Il y a quatre ans, Craig Hinds était sans-abri. Ancien de la marine américaine ayant servi plusieurs fois en Irak et en Afghanistan, il n'avait pas d'emploi et souffrait de troubles de stress post-traumatique (TSPT).

Sa vie a changé quand il a emménagé dans un immeuble réservé aux anciens militaires. Comme lui, grâce à un effort national pour résorber le problème des anciens combattants itinérants, plusieurs milliers de vétérans ont trouvé à se loger à New York. Le nombre des vétérans sans logement y a substantiellement diminué : de 4600 il y a quatre ans, il a fondu à 800.

Une injection massive de fonds fédéraux, une volonté politique et la création de logements plus abordables dans une ville aux loyers exorbitants pourraient même mener à l'élimination complète des vétérans sans domicile.

Entre 2005 et 2009, Craig Hinds était aide-soignant dans un hôpital militaire. Mais épuisé émotionnellement par ses missions, il décide de quitter la marine quand il apprend que sa mère a un cancer.

«J'étais vraiment choqué par tout ce que j'avais vu. Je ne voulais plus repartir en mission, je ne voulais plus perdre d'amis, je ne voulais pas mourir», explique-t-il.

Mais il n'avait pas idée des difficultés qui l'attendaient.

Son expérience militaire ne lui permet pas de travailler comme aide-soignant dans le civil. Il déménage d'Atlanta à New York, croyant plus facile d'y trouver du travail.

Il vit d'abord chez sa grand-mère, mais elle ne comprend pas sa dépression et le met dehors.

Ce n'est que lorsqu'il obtient un studio dans un immeuble réservé aux anciens combattants qu'il commence à remonter la pente. Il reprend des études de psychologie. À 38 ans, il aura son diplôme l'été prochain, et prévoit d'aider des prisonniers à retomber sur leurs pieds.

10 % des sans-abris 

En 2009, l'administration du président américain Barack Obama avait élaboré un plan pour mettre fin au phénomène des anciens militaires sans domicile d'ici fin 2015. En janvier 2014, leur nombre avait diminué de 33 % depuis 2010, selon la Maison-Blanche : ils étaient estimés à 49 933, 24 837 de moins qu'en 2010. Soit 10 % des adultes itinérants.

Depuis, certaines villes sont venues à bout du problème, comme La Nouvelle-Orléans, Houston, Salt Lake City, tout comme l'État du Connecticut.

Les chiffres pour 2015 ne sont pas encore connus.

«Il y a eu un gros effort», explique Tori Lyon, directrice du projet Jericho, qui procure des logements aux nécessiteux. Craig Hinds vit dans un de ses studios.

Mais «le vrai problème, c'est que les logements abordables sont trop rares», déplore-t-elle. La mairie de New York a beaucoup oeuvré pour changer cela cette année, mais il faut encore convaincre certains propriétaires d'accepter les aides au logement accordées aux vétérans.

Il avait fallu 10 à 12 ans après la guerre du Vietnam pour qu'apparaisse un grand nombre de vétérans sans-abris, selon les experts. Aujourd'hui, les anciens militaires se retrouvent parfois itinérants un ou deux ans seulement après avoir quitté l'armée.

Le fait de quitter un environnement très structuré, les blessures physiques et psychologiques, le manque de qualification, la drogue, le manque de soutien familial sont autant d'explications.

Gloria Montes, handicapée, a été militaire de 1979 à 1984.

Après avoir quitté l'armée, elle a travaillé dans une entreprise de sécurité, mais son propriétaire l'a expulsée en 2013. Elle a alors dormi dans une voiture ou chez des amis, avant de finalement retrouver un logement dans le Bronx en 2014, grâce au programme pour les vétérans.

«C'était dur, et je n'ai été dehors que trois, quatre mois», dit-elle. «Je ne peux pas imaginer ce que c'est pour des vétérans sans-abris pendant des années».

Elle veut que l'armée fasse plus pour aider ses anciennes recrues à se réadapter à la vie civile et profiter des aides possibles.

Le studio où elle vit avec son chien, Cache, est rempli de photos de famille, de livres et de souvenirs de baseball.

«Si j'ai une mauvaise journée, des mauvais souvenirs, j'ai mes voisins, le personnel en bas et ma famille pour m'aider», dit-elle. «Sans eux, je ne sais pas comment je m'en serais sortie».