Le président Barack Obama et le pape François ont affiché mercredi à la Maison-Blanche leur complicité et leur unité face aux défis de la communauté internationale comme les crises migratoires et le changement climatique.

Pour sa toute première visite historique aux États-Unis, le souverain pontife a également mis en garde les évêques américains face aux scandales de pédophilie et devait canoniser un prêtre du 18e siècle très controversé.

Autorité morale mais aussi allié politique de taille pour le 44e président des États-Unis, l'Argentin Jorge Bergoglio, qui n'avait jamais mis les pieds aux États-Unis, a placé d'entrée son périple sous le signe de la défense des plus démunis et de ceux qui sont contraints à l'exil.

«Comme fils d'une famille d'immigrés, je suis heureux d'être un hôte en ce pays, qui a été en grande partie bâti par de semblables familles», a-t-il lancé en anglais, dans une allusion à la controverse politique sur l'immigration hispanique aux États-Unis mais aussi aux dizaines de milliers de réfugiés qui fuient vers l'Europe le Moyen-Orient ravagé par les conflits.

Depuis les pelouses de la Maison-Blanche, sous un immense ciel bleu, M. Obama a rendu hommage devant 11 000 personnes au «message d'espoir» porté par le premier pape originaire des Amériques, «source d'inspiration pour tant de gens à travers le monde».

Le président américain, qui ne cache pas son admiration pour ce jésuite, a jugé que l'engouement que suscite sa visite à Washington ne pouvait être attribuée seulement à son rôle de pape mais aussi à ses «qualités uniques en tant que personne».

«Humilité et simplicité»

M. Obama a ainsi loué l'«humilité», la «simplicité», ou encore la «douceur des mots» de François,

A moins de 500 jours de la fin de son second mandat, M. Obama compte sur le soutien du souverain pontife sur deux chantiers prioritaires: Cuba et le climat.

Evoquant le «soutien précieux» du pape dans le rapprochement historique engagé depuis fin 2014 entre Washington et La Havane, le président a souligné qu'il était porteur d'une «meilleure vie pour le peuple cubain».

Sur la scène internationale, «nous vous remercions pour (...) votre appel aux nations à résister aux sirènes de la guerre et à résoudre les différends par la voie diplomatique», a lancé M. Obama qui a conclu en juillet un accord sans précédent avec l'Iran sur son programme nucléaire controversé.

Quant à la lutte contre le réchauffement climatique, priorité de l'administration Obama, François a insisté sur l'urgence d'un combat «qui ne peut être laissé à la génération future». Il a jugé «encourageantes» les initiatives annoncées par M. Obama sur ce dossier.

Après leurs discours et une cérémonie émouvante à la Maison-Blanche, les deux hommes ont eu un tête-à-tête dans le Bureau ovale, pour la seconde fois après leur entretien du printemps 2014 au Vatican.

Les États-Unis comptent près de 82 millions de catholiques, soit un quart de leur population.

Puis le pape a paradé devant des monuments emblématiques de Washington, debout et souriant sur la plate-forme de sa papamobile, une Jeep, sous les «Viva El Papa» de milliers de personnes enthousiastes qui l'ont acclamé en espagnol et en anglais.

Pédophilie  

François s'est ensuite rendu à la cathédrale St Matthew où il a exhorté les évêques américains à ce que les «crimes» de pédophilie qui ont secoué leur Église «ne se répètent jamais».

Le scandale des prêtres pédophiles avait éclaté dans les années 1980, discréditant l'Eglise américaine, les dédommagements des victimes ruinant plusieurs diocèses. Des milliers d'enfants et d'adolescents avaient été abusés sexuellement par des prêtres et des religieux.

Le pape devait ensuite canoniser l'évangélisateur de la Californie Junipero Serra, mort en 1784, au grand dam d'Indiens locaux: le moine franciscain est pour eux celui qui a d'abord apporté la mort et l'extinction de leur culture.

Mais Washington, happée depuis des mois par la campagne pour la présidentielle 2016, n'a d'yeux que pour ce pape arrivé mardi pour six jours aux États-Unis. Il s'agit seulement de la troisième visite d'un pape à la Maison-Blanche: Jimmy Carter avait reçu Jean-Paul II en 1979, et George W. Bush avait accueilli Benoît XVI en 2008.

Fait rare, M. Obama, qui est protestant, avait accueilli lui-même mardi sur une base militaire le pape argentin, qui fait sensation en se déplaçant à Washington dans une Fiat 500.

Politiquement, cette visite papale tombe à pic pour l'exécutif américain.

Lorsqu'il s'exprimera jeudi devant le Congrès, une première dans l'histoire des États-Unis, François devrait aussi plaider pour le rapprochement américano-cubain et pour le climat. Deux sujets sur lesquels nombre d'adversaires républicains de M. Obama ne décolèrent pas.

Le fait qu'il arrive tout juste de Cuba, où il a évité de critiquer le président Raul Castro, ne fait qu'irriter un peu plus ceux qui jugent que ce pape est un marxiste déguisé ou un traître à la foi catholique, qui serait trop souple sur la doctrine.

Dans les jours qui suivent, le pape doit aussi rencontrer des immigrés, des sans-logis et des détenus.

Il doit également présider à New York une cérémonie oecuménique sur le site du World Trade Center, contre le terrorisme et pour le respect entre religions. A Philadelphie, il doit présider ce week-end la fin d'une rencontre mondiale des familles catholiques, en présence d'un million et demi de personnes.

PHOTO AFP

François a rencontré des évêques à la cathédrale St Matthew.