Rien ne prépare vraiment à la variété et à l'intensité des émotions qui assaillent les voyageurs s'aventurant sur les quelque 65 km de l'Apache Trail.

La route, tracée là où les Apaches - peuple amérindien du sud-ouest des États-Unis - traversaient les montagnes, commence pourtant dans l'ordinaire banlieue de Phoenix. Dès Apache Jonction, cependant, lave-autos et commerces quelconques laissent place au désert de Sonora et à ses paysages dignes des westerns.

La première partie de cette route aménagée pour la construction du barrage Theodore Roosevelt, de 1905 à 1911, a d'ailleurs servi de décor à une trentaine de films de cowboys et d'Indiens dans les années 60. Un incendie a détruit ce qu'il restait des décors en 2004, mais le Superstition Mountain Museum en a rassemblé les vestiges, dont une petite chapelle où Elvis Presley a tourné Charro! (1969).

Non loin de là, le village fantôme de Goldfield propose aussi un retour dans le temps du Far-West, dans un cadre très commercial, avec restaurants, tyrolienne, spectacles et boutiques. Le tout avec vue sur The Flatiron, une singulière montagne de la chaîne de la Superstition, derrière laquelle se cacherait la légendaire mine d'or du Dutchman, Jacob Waltz, un immigrant allemand qui l'aurait découverte à la fin du XIXe siècle. Personne ne l'a jamais retrouvée.

On peut grimper au sommet de The Flatiron, à près de 1500 m d'altitude, par les sentiers du Lost Dutchman State Park, à quelques kilomètres de là. L'excursion dure près de cinq heures. Les randonneurs peuvent se contenter de monter en une heure au Green Boulder, à un peu moins de 800 m. Ici, point de manèges ni de souvenirs, plutôt des vues qui portent loin sur un horizon parsemé de saguaros, ces emblématiques cactus aux longs bras, et de cholla, aux impardonnables épines (gardez-vous bien d'y toucher). En chemin, les plus chanceux croiseront de colorés lézards à collier.

La route s'enfonce ensuite dans un désert vallonneux, le long de la rivière Salt, jusqu'au lac Canyon, qui possède quelques belles plages. Par plus de 40° à l'ombre, une halte y est bienvenue.

Pour passer à table à l'abri du soleil, rendez-vous à Tortilla Flats, ancien relais de diligences, passé le lac. Le Saloon brasse sa propre bière et sert des portions gargantuesques. On peut aussi y acheter de l'eau. Et c'est le moment de faire des provisions, car c'est ici que l'aventure, la vraie, commence.

Piste de terre battue

Peu après Tortilla Flats, la route se transforme en piste de terre battue, souvent trop étroite pour laisser passer deux véhicules à la fois. La piste grimpe dans les montagnes, contourne des falaises, un virage abrupt après l'autre sur environ 35 km, toujours le long de la rivière Salt, puis du lac Apache. Mieux vaut rouler tout doucement, car une fausse manoeuvre risquerait d'être fatale sur cette portion moins fréquentée de l'Apache Trail.

De toute façon, le décor mérite qu'on y pose longuement les yeux. Il est grandiose. Magique. Phénoménal. Sauvage. Vertigineux. Les mots manquent. Osons les suivants: cette portion de l'Apache Trail est la quintessence du road-trip en plein désert.

Entre poussées d'adrénaline et ravissement, on est bouleversé par tant de beauté, renouvelée chaque fois que la route franchit un cap, surplombe une vallée, côtoie une falaise...

Puis, au bout de la route, l'asphalte réapparaît, juste avant d'arriver au barrage Roosevelt. Haut de 109 m, il s'accroche aux parois des montagnes, son bassin formant un immense lac au coeur des terres arides. Le parfait point d'orgue pour clore une fameuse escapade.

Photo Simon Chabot, La Presse

La route, souvent étroite, n'est pas pavée sur quelque 35 km, obligeant les conducteurs à ralentir... ce qui leur permet aussi d'admirer le paysage.

Photo Simon Chabot, La Presse

La chapelle d'Elvis au Superstition Mountain Museum. Le King a tourné des scènes dans ce minuscule lieu de culte désormais voué à sa mémoire.