La démarche de Matthew McLaughlin est abjecte. Le 24 février, cet avocat de Huntington Beach, en Californie, a déposé auprès de l'État une proposition de référendum visant à permettre l'exécution des homosexuels. La demande était accompagnée d'un chèque de 200$, montant requis pour lancer une initiative populaire dans l'État qui a popularisé la démocratie directe aux États-Unis.

Mais la ministre de la Justice de la Californie, Kamala Harris, responsable des référendums, ne veut ni encaisser ce chèque ni officialiser cette proposition en la désignant par un nom de son choix et en en présentant un résumé aux électeurs, comme l'exige la loi. Aussi a-t-elle demandé mercredi à la Cour supérieure de la Californie de la décharger de cette responsabilité dans ce cas précis.

«Si la Cour ne m'accorde pas cette dispense, mon bureau sera obligé de nommer et résumer cette proposition qui vise à légaliser la discrimination et le vigilantisme», a-t-elle affirmé.

Même si la ministre Harris perd sa cause, la démarche de Matthew McLaughlin ne risque guère d'aboutir à une loi. Pour que la proposition de l'avocat soit soumise aux électeurs, celui-ci devrait récolter 365 880 signatures dans un délai de 180 jours, une tâche gigantesque dans les meilleures circonstances. N'empêche, Kamala Harris n'est évidemment pas la seule personne en Californie à vouloir couper l'herbe sous le pied du juriste homophobe.

«Je n'aime pas prédire ce que les tribunaux décideront, car ils sont imprévisibles. Mais je pense qu'un juge serait en droit et juridiquement correct d'accorder à [la ministre Harris] une dispense», a déclaré à La Presse Vikram Amar, professeur de droit à l'Université de Californie à Davis.

«Ce que cette proposition demande n'est pas seulement immoral, révoltant, vil et odieux. C'est aussi illégal en vertu des constitutions de la Californie et des États-Unis.»

Certains collègues du professeur Amar ne pensent pas moins que la ministre Harris n'aura d'autre choix que de donner suite à la proposition de Matthew McLaughlin. Membre en règle du Barreau californien, cet homme n'en est pas à sa première expérience en matière de démocratie directe. En 2004, il a déposé en vain une proposition visant à permettre aux enseignants des écoles publiques de Californie d'utiliser la Bible comme manuel scolaire.

«Crime abominable»

Dans sa nouvelle proposition, Matthew McLaughlin qualifie l'homosexualité de «crime abominable contre la nature» que «Dieu Tout-Puissant nous commande de réprimer».

Et il ajoute: «Considérant qu'il est préférable que les contrevenants périssent plutôt que de voir le reste d'entre nous encourir la juste colère de Dieu du fait de notre tolérance insensée au mal qui se répand parmi nous, le peuple de Californie, craignant Dieu, recommande dans sa sagesse que toute personne qui touche en conscience une autre personne du même sexe aux fins de gratification sexuelle soit mise à mort par balles dans la tête ou toute autre méthode plus pratique.»

La proposition de l'avocat prévoit également l'interdiction de la «propagande» homosexuelle, punissable par des amendes pouvant atteindre 1 million de dollars et des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 10 ans.

Matthew McLaughlin se fait discret depuis le dépôt de sa proposition, refusant de répondre aux journalistes qui cognent à sa porte ou qui lui téléphonent. Une pétition lancée sur Change.org réclame sa radiation du Barreau.