Des milliers de policiers venus de tous les États-Unis ont rendu hommage dimanche à un collègue assassiné fin décembre à New York, un petit nombre profitant de la cérémonie pour défier une nouvelle fois le maire de la ville.

Quelques dizaines de policiers, parmi la foule très dense venue aux funérailles de Wenjian Liu, ont tourné ostensiblement le dos aux écrans où apparaissait le maire Bill de Blasio qui prenait la parole, selon les images de télévision et des photos diffusées sur les réseaux sociaux.

La cérémonie elle-même qui se déroulait dans un funérarium de Brooklyn - le quartier où Wenjian Liu et son collègue Rafael Ramos ont été abattus - n'a pas été perturbée.

Le 27 décembre, des centaines de policiers avaient déjà tourné le dos aux écrans montrant M. de Blasio lors des funérailles de Rafael Ramos. Le geste humiliant avait étalé au grand jour les tensions entre l'élu et ses 34 000 hommes et femmes en uniforme.

M. de Blasio avait soutenu les manifestations qui dans tout le pays dénonçaient le racisme de policiers après les tragiques décès de deux Noirs, tués par la police cet été alors qu'ils n'étaient pas armés. La mobilisation s'était amplifiée à l'automne lorsque les policiers impliqués - y compris des membres du NYPD - tous blancs - ont échappé à toute poursuite.

Le soutien de M. de Blasio aux manifestants est mal passé dans la troupe, la plus importante force de police du pays.

Certains policiers ne lui ont pas pardonné non plus d'avoir déclaré début décembre qu'il avait expliqué à son fils adolescent, qui est métis, qu'il devait faire attention dans ses interactions avec les forces de l'ordre.

Une réunion mardi entre le maire et cinq syndicats de police, pour essayer d'apaiser les tensions, n'a permis aucune avancée.

Les responsables de deux de ces syndicats avaient accusé M. de Blasio d'avoir du sang sur les mains après le double meurtre.

Les appels du chef de la police, Bill Bratton, à ne pas profiter de la cérémonie pour marquer leur désapprobation n'ont donc été que partiellement entendus.

La ville au coeur brisé

Le 20 décembre, Wenjian Liu et Rafael Ramos avaient été abattus à bout portant par un déséquilibré, qui affirmait vouloir venger la mort de Michael Brown et Eric Garner.

Le maire a rendu hommage au «courage, au sacrifice et à la gentillesse» de Wenjian Liu dans son éloge funèbre.

«Toute la ville a le coeur brisé», a ajouté le maire.

«Wenjian Liu était un homme bon. Il a suivi la voie du courage, la voie du sacrifice et la voie de la gentillesse. Voilà qui il était et voilà celui qui nous a été ravi beaucoup trop tôt», a souligné M. de Blasio.

Pour le maire, Wenjian Liu, immigré de Chine à l'âge de 12 ans, était l'incarnation du rêve américain.

«L'histoire du détective Liu est une puissante histoire de l'Amérique, c'est un classique conte de New York», a-t-il dit.

En larme, la jeune veuve du policier, Pei Xia Chen, qui a épousé Wenjian liu seulement quelques mois avant sa mort, a salué la mémoire de son mari, son «âme soeur» et un «mari merveilleux».

Le cercueil du policier, drapé des couleurs de la NYPD, a ensuite été déposé dans un corbillard par six policiers en uniforme de cérémonie.

À l'instar des militaires américains, dont les rites et traditions ont influencé ceux des hommes en bleu, les porteurs ont plié le drapeau et l'ont remis à la veuve.

Le cortège, précédé de motos de police à perte de vue, s'est ébranlé vers le cimetière entre une impressionnante haie de milliers de policiers.

Les joueurs de cornemuse du NYPD, en kilt, ont aussi rendu hommage à leur camarade, comme le veut la tradition de cette force de police, marquée par les origines irlandaises de nombre de ses membres depuis sa création en 1845.

Les funérailles de Wenjian Liu avaient été retardées pour permettre à la famille de faire le voyage de Chine.