Barack Obama a assuré mercredi être prêt à travailler avec les républicains après la déroute historique des démocrates au Congrès, mais aussitôt affiché sa détermination à agir sur l'immigration, véritable chiffon rouge pour ses adversaires.

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«Les républicains ont clairement passé une bonne soirée»: c'est en ces quelques mots que le président américain a reconnu la défaite de son camp, se refusant à élaborer sur sa propre responsabilité dans cette déroute.

Six ans après son élection triomphale à la Maison-Blanche, Barack Obama s'est retrouvé mercredi avec la plus large majorité républicaine au Congrès depuis des décennies. Les républicains ont fait carton plein en remportant le Sénat, accroissant leur majorité à la Chambre, mais aussi en élisant des gouverneurs dans des États qui n'avaient pas vu la couleur républicaine depuis longtemps.

«J'ai hâte de travailler avec le nouveau Congrès pour que les deux prochaines années soient aussi constructives que possible», a déclaré M. Obama, lors d'une conférence de presse à la Maison-Blanche. «Le message retentissant de cette élection et des dernières élections, est que nous devons agir».

Le président américain a en particulier annoncé qu'il demanderait formellement au Congrès de débattre d'une autorisation de recours à la force contre le groupe État islamique, une initiative réclamée cet automne par les élus des deux partis. Une résolution parlementaire permettrait de préciser les contours exacts de l'opération militaire contre les jihadistes en Syrie et en Irak.

«Le monde doit savoir que les États-Unis sont unis dans cet effort, et les hommes et femmes de notre armée méritent notre soutien clair et uni», a-t-il déclaré, reconnaissant qu'il était «trop tôt» pour savoir si la coalition internationale était en train de l'emporter face aux jihadistes.

M. Obama a aussi jugé que les deux partis pourraient trouver un terrain d'entente dans deux domaines : les infrastructures et le soutien aux exportations américaines, une allusion aux deux traités de libre-échange en négociation avec l'Union européenne et 11 pays asiatiques.

Mais le président qui, comme nombre de ses prédécesseurs, doit achever son mandat à la Maison-Blanche avec un Congrès aux mains de ses opposants, a très vite tracé ses lignes directrices, réaffirmant en particulier sa décision d'agir sur l'immigration, par décrets, d'ici la fin de l'année.

«Je ne vais pas me contenter d'attendre», a-t-il asséné à l'adresse de ses adversaires politiques, rappelant qu'un vaste projet de réforme avait été bloqué par les républicains du Congrès il y a de nombreux mois. «Nous allons prendre toutes les mesures légales possibles qui permettront, selon moi, d'améliorer le fonctionnement de notre système d'immigration, d'augmenter les ressources disponibles pour les frontières où l'inquiétude des Américains se concentre», a-t-il expliqué, sans fournir de détails.

Quelques minutes plus tôt, le chef des républicains du Sénat, Mitch McConnell, avait lancé une véritable mise en garde contre d'éventuels décrets qui incluraient vraisemblablement la régularisation d'une partie des 11 millions de sans-papiers installés aux États-Unis. «Ce serait un chiffon rouge de nous dire: puisque vous ne voulez pas faire ce que je veux, je vais le faire tout seul», a-t-il affirmé.

«Pas entendu le message» 

Preuve que la collaboration s'annonce difficile, Reince Priebus, président du Comité national républicain, a d'ores et déjà jugé que M. Obama n'avait «pas entendu le message des élections» et ne semblait vouloir appliquer que «ses idées, anciennes, qui ont échoué».

Les républicains ont cependant fait un geste d'apaisement sur la question épineuse des négociations budgétaires, qui donnent régulièrement lieu à des batailles homériques avec la Maison-Blanche. «Il n'y aura pas de paralysie de l'État ni de défaut de paiement sur la dette nationale», a assuré Mitch McConnell.

Les électeurs américains sont 70% à estimer que la situation économique du pays est mauvaise; seuls 1% la qualifient d'«excellente», selon les sondages de sorties d'urnes conduits par un consortium de médias américains.

La sentence tranche avec l'assertion, répétée à chaque déplacement par Barack Obama, que quasiment tous les indicateurs économiques américains sont au vert, signe du redressement de l'économie depuis le pic de la récession en 2009. La croissance s'est affichée à 3,5% au troisième trimestre et le chômage au plus bas depuis six ans à 5,9%.

Commentant les négociations entre les puissances du P5+1 et Téhéran sur le programme nucléaire iranien, M. Obama a affirmé que les États-Unis avaient présenté à l'Iran le «cadre» d'un éventuel accord international, sans toutefois garantir la conclusion d'un tel règlement historique avant la date-butoir du 24 novembre.

«Nous verrons dans les trois ou quatre semaines si nous pouvons effectivement conclure un accord», a dit le président des États-Unis, qui a fait du rapprochement avec l'Iran l'un des objectifs de son second mandat. Mais, a-t-il réaffirmé: «Je préfère n'avoir aucun accord plutôt qu'un mauvais accord».