Un passeport américain doit-il refléter la politique étrangère des États-Unis et notamment sa position sur la question du statut de Jérusalem? La Cour suprême est apparue divisée sur la question lundi, à travers le cas d'un Américain né dans la ville sainte.

Les neuf membres de la plus haute autorité judiciaire des États-Unis étaient indirectement saisis lundi de «la question sensible» du statut de Jérusalem, selon les mots de la juge Elena Kagan, à propos du passeport de Menachem Zivotofsky, né en 2002 dans la ville sainte de deux parents américains.

Les parents du jeune garçon veulent que la mention «Israël» soit ajoutée sur son passeport à celle de «né à Jérusalem».

Or, la communauté internationale et les États-Unis respectent une stricte neutralité sur cette question, un des multiples points de contentieux depuis des décennies entre Israéliens et Palestiniens, qui revendiquent chacun la souveraineté sur la ville.

Le Département d'État, qui établit les passeports, se contente ainsi de nommer la ville comme lieu de naissance.

Mais une loi fédérale a été votée par le Congrès, signée en 2002 par l'ancien président George W. Bush, qui autorise pour un citoyen américain né à Jérusalem, à porter la mention «Israël» sur son passeport.

Le président Bush avait assorti sa signature d'une déclaration condamnant précisément ce passage imposé par le Congrès, qui faisait sous-entendre la reconnaissance de la ville comme capitale de l'État hébreu, comme «une ingérence inacceptable dans le pouvoir constitutionnel du président à conduire la politique étrangère du pays».

50 000 passeports

La Cour Suprême doit donc examiner la constitutionnalité de cette loi avec en débat la question de la séparation des pouvoirs entre exécutif et législatif et les prérogatives constitutionnelles de l'exécutif sur le législatif en matière de politique étrangère.

Une partie des juges semblaient vouloir abonder dans le sens du gouvernement, qui réaffirme que le Congrès ne doit pas empiéter sur les prérogatives du président, alors que d'autres juges estimaient que la loi votée au Congrès n'était pas une déclaration politique.

«Ce n'est pas une reconnaissance», a ainsi indiqué le juge conservateur Antonin Scalia.

«Jérusalem est maintenant une poudrière», a ajouté la juge Elena Kagan. «L'histoire montre que tout ce qui touche à Jérusalem compte», a-t-elle insisté.

Les parents du jeune Américain, par la voix de l'avocate Alyza Lewin, estiment que la Constitution ne donne pas au seul président le pouvoir de reconnaissance de tel ou tel pays. Ils estiment également qu'un passeport sert à identifier un individu, pas à proclamer une position politique.

Pour le gouvernement au contraire, par la voix de son avocat Donald Verrilli, la question de la reconnaissance de telle ou telle souveraineté est «du domaine de l'exécutif» et conclure le contraire «sabote la crédibilité du président».

En mars 2012, la haute Cour avait jugé que la demande des parents de voir Israël inscrit sur le passeport était juridiquement recevable, sans toutefois se prononcer sur le fond de l'affaire.

Quelque 50 000 passeports américains de ce type sont susceptibles d'être concernés par cette question.