Barack Obama a lancé jeudi un appel au calme et appelé les forces de l'ordre à la retenue après les violences qui ont secoué la ville de Ferguson, dans le Missouri, où un policier blanc a abattu un jeune Noir.

Jugeant que la police devait être «transparente» sur ce qui s'était exactement passé samedi soir, il a aussi mis en garde les forces de l'ordre contre «un usage excessif de la force lors de manifestations pacifiques».

M. Obama, qui s'est entretenu au téléphone avec le gouverneur du Missouri Jay Nixon, a également souligné qu'il n'existait «aucune excuse» à la violence contre des policiers.

«Les émotions sont à vif à Ferguson et il y a incontestablement des différences marquées sur ce qui s'est passé», a reconnu le président américain. «Mais le temps du calme et de la paix dans les rues de Ferguson est venu», a-t-il ajouté, appelant de ses voeux une enquête «ouverte et transparente».

Les tensions, qui ont ravivé le spectre du racisme aux États-Unis, sont apparues après la mort de Michael Brown, un jeune homme noir abattu par un policier blanc samedi dernier dans cette ville de la banlieue de Saint-Louis.

Les récits sur les circonstances du décès diffèrent. Selon un témoin, Michael Brown, qui allait rendre visite à sa grand-mère et n'était pas armé, marchait dans la rue quand un agent de police s'en est pris à lui et l'a abattu alors qu'il avait les mains en l'air.

Selon la police, Michael Brown a été tué après avoir agressé un policier et tenté de lui dérober son arme.

Depuis, la communauté noire s'est mobilisée et les manifestations se sont succédé dans cette ville où 14 000 des 20 000 habitants sont d'origine afro-américaine, mais où les policiers sont très majoritairement blancs.

Le cri de ralliement des manifestants est «Don't Shoot» («Ne tirez pas»), en référence aux derniers mots qu'aurait prononcé Michael Brown avant de se faire abattre.

Le maire de la ville James Knowles a demandé mercredi que «tous les groupes qui veulent se rassembler pour prier ou protester le fassent seulement en journée, de manière organisée et respectueuse».

Policiers lourdement armés

Mais les manifestations des derniers jours ont donné lieu à des scènes assez violentes, avec notamment des pillages dans la nuit de dimanche à lundi et plusieurs dizaines d'interpellations.

Mercredi soir la police antiémeute est intervenue assez sèchement sur le site d'une station essence incendiée où les manifestants s'étaient rassemblés.

Les forces de l'ordre sont déployées en nombre et les policiers, visiblement tendus, sont très lourdement équipés face aux manifestants.

L'image d'un tireur d'élite en treillis militaire qui vise la foule avec son fusil à lunette, juché sur un véhicule blindé, a fait le tour des réseaux sociaux, très mobilisés en faveur des manifestants, pour dénoncer cette démonstration de force.

De nombreux anciens combattants des guerres d'Irak et d'Afghanistan se déclarent aussi choqués de voir des policiers plus lourdement armés qu'ils ne l'étaient souvent dans leurs zones de guerre.

Provoquant cette fois l'ire des médias, la police avait brièvement arrêté mercredi deux journalistes, dont un correspondant du Washington Post, qui ont ensuite été relâchés sans avoir été inculpés.

Ils ont apparemment été arrêtés pour ne pas avoir quitté assez rapidement le restaurant McDonald's où ils se trouvaient après une injonction de la police aux abords d'une manifestation.

«Ici, aux États-Unis, la police ne devrait pas harceler ou arrêter des journalistes qui essayent simplement de faire leur travail et de raconter aux Américains ce qu'ils voient sur le terrain», a repris M. Obama, qui s'exprimait depuis l'île de Martha's Vineyard, dans le Massachusetts, où il passe ses vacances.

La police, qui a reçu des menaces, n'a pas voulu donner le nom du policier qui a abattu Michael Brown. Selon les médias, celui-ci fait partie des forces de l'ordre depuis six ans et ne posait pas de problèmes particuliers.

Le FBI a lancé une enquête sur la mort du jeune homme en parallèle à celle menée par la police du comté.

«Michael Brown n'a rien fait pour justifier d'être exécuté en plein jour, c'est la pire fusillade de la police que j'ai jamais vu. Il nous faut des réponses», a déclaré l'avocat de la famille Benjamin Crump.

M. Crump était déjà l'avocat de la famille de Trayvon Martin, un jeune Noir abattu en 2012 par un vigile de quartier en Floride (sud-est), dont la mort avait relancé le débat sur le racisme et les lois encadrant la légitime défense.

Le vigile, George Zimmerman, qui a reconnu avoir tué le jeune homme âgé de 17 ans, avait été acquitté après avoir plaidé la légitime défense.

Photo AP

Les tensions étaient vives dès le crépuscule. Les policiers, lourdement équipés, ont ordonné aux manifestants de retourner à la maison. Ils ont alors utilisé des bombes fumigènes et, après que certains protestataires eurent lancé des cocktails Molotov dans leur direction, des gaz lacrymogènes.