Monica Lewinsky est de retour dans l'actualité américaine et depuis trois jours, son histoire n'en finit plus d'alimenter les réseaux sociaux.

Mardi, le magazine Vanity Fair a publié des extraits d'un texte écrit au «je» dans lequel l'ex-stagiaire à la Maison-Blanche revient sur la relation inconvenante qu'elle a entretenue avec le président Bill Clinton au milieu des années 90.

Dans ce texte très personnel, la jeune femme, aujourd'hui âgée de 40 ans, affirme qu'elle regrette ce qui s'est passé, mais en même temps, rappelle que cette sulfureuse relation a eu lieu entre deux adultes consentants. Monica insiste: elle n'était pas une victime.

Elle l'est toutefois devenue lorsque la garde rapprochée des Clinton a tout fait pour sauvegarder la réputation du président, dont ce n'était pas la première incartade.

Vrai, Bill Clinton a frôlé la destitution. Il a dû s'expliquer sur la place publique, répondre aux attaques des républicains et s'expliquer auprès de sa famille.

Mais ce n'est rien, répliquent aujourd'hui plusieurs femmes, à côté du traitement qu'a subi Monica Lewinsky.

Dans son texte, cette dernière raconte qu'une fois son histoire dévoilée au grand jour, sa vie est devenue un enfer. La jeune femme n'a jamais pu trouver d'emploi et s'est finalement exilée à Londres pour terminer une maîtrise en psychologie sociale.

«Tarée narcissique» 

«Le féminisme m'a lâchée», écrit-elle dans le Vanity Fair, rappelant qu'elle a été dépeinte dans les médias comme une fille facile à la sexualité débridée. Hillary Clinton l'a pour sa part qualifiée de «tarée narcissique». Dans cette histoire, soulignent plusieurs observatrices, c'est la réputation de la femme qui a été malmenée.

En effet, 16 ans plus tard, Bill Clinton est un homme politique respecté, courtisé par les médias et qui commande des cachets faramineux pour ses conférences.

«Non seulement les médias ont pardonné à son partenaire sexuel, mais ils lui ont même concédé une dose supplémentaire de séduction», écrit l'auteure féministe Rebecca Traister dans New Republic.

Monica Lewinsky, elle, n'a jamais pu trouver un emploi dans les domaines qui l'intéressaient. Même si plusieurs lui reprochent d'avoir contribué à cette sinistre notoriété en accordant des entrevues, en participant à l'émission humoristique Saturday Night Live ou en publiant un livre qui racontait son histoire, personne ne peut la contredire sur un point: sa réputation est un boulet dont elle n'a jamais pu se défaire.

Le Washington Post a pour sa part retrouvé une entrevue avec un des piliers du féminisme, Betty Friedan. Durant la campagne présidentielle d'Al Gore, l'auteure de Feminine Mystique avait déclaré: «Je ne supporte pas la manière dont les médias dévalorisent tout. Qu'avez-vous à parler d'une petite stupide nommée Monica? Que vient-elle faire dans l'élection américaine? Ça me dégoûte!»

Comment faut-il réinterpréter le retour de Monica Lewinsky dans les médias aujourd'hui? se demandent plusieurs analystes de la politique américaine. Est-ce une façon de déstabiliser Hillary Clinton, qui n'a toujours pas annoncé sa candidature pour 2016? Ou serait-ce plutôt une manoeuvre des démocrates pour rendre plus sympathique l'ex-première dame trompée? À moins que ce ne soit un tremplin pour Monica Lewinsky, qui souhaiterait se repositionner comme porte-parole des victimes d'intimidation en ligne, elle dont l'histoire a d'abord éclaté sur un site web, The Drudge Report, et qui se considère comme la première victime de l'internet?

Monica Lewinsky est peut-être victime d'internet, estiment plusieurs féministes, mais elle est surtout victime du «deux poids, deux mesures».