Malgré la menace du premier défaut de paiement de l'histoire des États-Unis, le Congrès américain a offert mardi une autre illustration frappante de son dysfonctionnement, provoquant un coup de semonce de l'agence de notation Fitch.

Au lendemain de négociations encourageantes au Sénat, les dirigeants républicains de la Chambre des représentants ont tenté de présenter leur propre plan pour relever le plafond légal de la dette et mettre fin à la paralysie partielle de l'État fédéral. Or, craignant d'être désavoués et humiliés par les élus de leur propre groupe, ils ont renoncé en soirée à soumettre à un vote l'une ou l'autre des deux propositions qu'ils avaient avancées au cours de la journée.

Cette confusion sans précédent a pesé dans la décision de Fitch de placer sous «surveillance négative» la dette souveraine à long terme des États-Unis, actuellement la meilleure possible à AAA.

«Les gesticulations politiques et la réduction de la marge de manoeuvre financière pourraient accroître le risque d'un défaut des États-Unis», a affirmé Fitch, troisième agence de notation financière après Standard&Poor's et Moody's.

En août 2011, Standard& Poor's avait abaissé la note américaine malgré un accord de dernière minute pour relever la limite légale de la dette.

Jeudi, la limite

Le Congrès a jusqu'à jeudi pour relever le plafond de la dette, faute de quoi le Trésor américain ne pourra plus emprunter. Celui-ci ne disposerait alors que d'environ 35 milliards de dollars pour faire face aux obligations des États-Unis. Avec l'arrivée imminente de paiements plus importants, il pourrait se retrouver rapidement dans l'incapacité d'honorer tous ses engagements.

«Cette annonce reflète l'urgence avec laquelle le Congrès devrait agir pour ôter cette menace de défaut qui pèse sur notre économie», a déclaré Brandi Offine, porte-parole du Trésor, en faisant allusion à la décision de Fitch.

La dernière proposition des républicains de la Chambre prévoyait un financement de l'État fédéral jusqu'au

15 décembre et un relèvement du plafond de la dette jusqu'au 7 février. Elle interdisait cependant au Trésor d'utiliser des «mesures extraordinaires» pour reporter cette date butoir. Et elle éliminait les subventions fédérales auxquelles ont droit les élus du Congrès, leurs collaborateurs et les responsables du conseil de direction pour financer le coût de leur assurance maladie.

Jugé inacceptable par la Maison-Blanche et ses alliés démocrates du Congrès, ce plan était néanmoins considéré comme insuffisant par plusieurs élus républicains de la Chambre. Ceux-ci se plaignaient de n'y retrouver aucune mesure pour retarder la mise en oeuvre de la loi sur la santé de Barack Obama, leur bête noire.

Négociations cruciales

L'inaction de la Chambre devrait ouvrir la voie au Sénat, qui pourrait tenir un vote sur son propre texte pour résoudre l'impasse politique. Ce plan faisait toujours l'objet de négociations mardi soir entre le chef de la majorité démocrate, Harry Reid, et le chef de la minorité républicaine, Mitch McConnell.

«Le sénateur Reid et le sénateur McConnell ont repris leurs négociations et ont bon espoir qu'une entente soit à portée de main», a déclaré Adam Jentleson, porte-parole du sénateur Reid.

Dans l'éventualité d'un vote positif au Sénat sur une entente bipartite, les dirigeants républicains de la Chambre devraient décider de soumettre ou non le texte à un vote des représentants. L'organisation d'un tel vote pourrait provoquer la révolte des élus républicains les plus conservateurs et mettre en danger le poste du président de la Chambre, John Boehner.

L'entente du Sénat pourrait cependant être adoptée par une majorité de la Chambre composée de l'ensemble des élus démocrates et d'une poignée d'élus républicains plus modérés.

Cet accord devrait prévoir le relèvement du plafond de la dette jusqu'au 7 février, le financement de l'État fédéral jusqu'au 15 janvier et l'ouverture immédiate de négociations formelles entre républicains et démocrates, portant sur le reste de l'année budgétaire 2014.