Le président américain Barack Obama a dû écourter un voyage en Asie prévu la semaine prochaine en raison de la paralysie depuis mardi des administrations fédérales, pour cause de blocage budgétaire persistant au Congrès.

Le dirigeant des États-Unis a annulé une visite prévue le 11 octobre en Malaisie et une autre aux Philippines. Il sera remplacé dans ces deux pays par le secrétaire d'État John Kerry.

Et une incertitude plane toujours sur sa présence à deux sommets internationaux, celui de l'APEC (Asie-Pacifique) qui s'ouvre lundi prochain sur l'île indonésienne de Bali, et celui d'Asie de l'Est, à Brunei.

Les visites en Malaisie et aux Philippines «étant à la fin du voyage, notre personnel n'était pas encore sur place et nous n'avons pas été en mesure d'avancer dans la planification», a expliqué la porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Caitlin Hayden.

Quant à la participation de M. Obama aux deux sommets, la Maison-Blanche évaluera ces déplacements «en fonction de l'évolution de la situation cette semaine», a ajouté Mme Hayden, qui a demandé à nouveau au Congrès de «rouvrir les services fédéraux».

Faute d'un accord sur le budget entre les démocrates majoritaires au Sénat et l'opposition républicaine qui domine à la Chambre des représentants, les administrations centrales des États-Unis sont partiellement fermées depuis mardi matin à 0 h. Environ 800 000 fonctionnaires, sur plus de deux millions, ont été mis en congé sans solde, entraînant la fermeture par exemple de parcs et de musées, et l'instauration d'un service minimum dans de nombreuses administrations publiques.

Barack Obama a accusé mardi, depuis la roseraie de la Maison-Blanche, ses adversaires de mener une «croisade idéologique» qui coûte leurs salaires à des centaines de milliers de fonctionnaires.

Le président américain a imploré les républicains du Congrès de voter sans attendre pour mettre fin à la paralysie, la première depuis 1996.

Pas de réouverture «par morceaux»

Les républicains qui dominent la Chambre des représentants ont changé de stratégie mardi, après l'échec de leur tentative de faire adopter par le Sénat une loi de finances qui aurait sabordé la loi sur la santé de Barack Obama.

Mais leur nouveau projet a été enterré dès la Chambre, lors de trois votes négatifs sur des mini-lois de finances qui visaient à «rouvrir» seulement trois secteurs de l'État fédéral : les parcs et monuments nationaux, les services aux anciens combattants et les services de la ville de Washington.

La Maison-Blanche refuse cette approche «par morceaux» qui ne résoudrait pas la situation pour les autres agences fédérales, comme la recherche ou l'enseignement. Et Barack Obama y aurait opposé son veto.

Victimes les plus visibles du blocage : les monuments et musées nationaux de Washington, la Statue de la Liberté à New York et les immenses parcs naturels nationaux comme Yosemite, qui sont restés fermés aux touristes.

Mais bravant l'interdiction, et avec l'appui de parlementaires, des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale ont forcé mardi les barrières qui leur interdisaient l'accès à un monument érigé en souvenir du conflit, à Washington.

Dans la capitale fédérale, des fonctionnaires sommés de rester chez eux s'emportaient contre les élus du Congrès, à l'image de Christine Baughman, la cinquantaine, employée à l'agence de protection de l'environnement. «Ils avaient six mois pour voter le budget, mais apparemment ça n'était pas assez! Ça n'est jamais assez», a-t-elle lancé.

Les fonctionnaires ont eu quelques heures pour ranger leurs affaires et rentrer chez eux mardi, sans garantie de paie rétroactive.

De la défense à l'enseignement, toutes les administrations ont réduit leurs effectifs au minimum vital. La Maison-Blanche fonctionnait avec 25 % de son personnel et plusieurs statistiques macro-économiques ne pourront être publiées.

Autre conséquence : les cimetières militaires américains dans le monde étaient eux aussi fermés «temporairement».

La sécurité nationale et les services essentiels, comme les opérations militaires, le contrôle aérien et les prisons, étaient toutefois globalement exemptés.

Plafond de la dette

Ce «shutdown» - la fermeture partielle des services fédéraux - marque le pic de 33 mois d'affrontements sur le budget entre démocrates et républicains, qui ont repris le contrôle de la Chambre en janvier 2011, après l'élection de dizaines d'élus de la mouvance populiste Tea Party.

Ceux-ci insistent depuis des mois pour voter un budget qui vide de son contenu la réforme de l'assurance-maladie, pièce maîtresse du bilan social du président.

Un volet important de la réforme est entré en vigueur mardi : des millions d'Américains démunis d'assurance maladie ont commencé à souscrire sur l'internet à une couverture subventionnée à partir de janvier 2014.

Mais 77 % des Américains sont contre une fermeture partielle des activités de l'État dans le but de bloquer l'application de cette réforme, selon l'institut Quinnipiac.

La fermeture des services fédéraux ne devrait toutefois avoir qu'un impact limité sur la première économie mondiale, contrairement à celui qu'aurait une impasse persistante sur le relèvement du plafond de la dette, qui doit faire l'objet d'un accord d'ici au 17 octobre, faute de quoi les États-Unis ne pourront plus faire face à toutes leurs obligations financières.

Le secrétaire au Trésor Jacob Lew a redit mardi soir que la paralysie de l'État ne changerait rien à la date-butoir du 17 octobre, tandis que des parlementaires prédisaient une fusion des deux dossiers dans les jours à venir.

Ces blocages sur le budget et la dette commençaient à inquiéter les places financières. La Bourse de Tokyo qui a terminé la séance en forte baisse de 2,17 % .