Ils sont venus par dizaines de milliers, la plupart des Noirs américains, célébrer au coeur de Washington baigné de soleil les 50 ans du discours historique de Martin Luther King, «Je fais un rêve», sur les droits civiques.

Une foule armée de pancartes s'est massée samedi durant plusieurs heures, sous un ciel bleu limpide, tout autour de la «Reflecting Pool», l'étroit et long bassin faisant face au mémorial de l'ancien président Abraham Lincoln. C'était précisément là où le 28 août 1963 le pasteur Martin Luther King prononça sa fameuse allocution contre la ségrégation, qui devait profondément marquer la société américaine.

«Le travail n'est pas fini, le voyage n'est pas terminé!», a lancé dans une intervention enflammée le fils de «MLK», Martin Luther King III, à propos de la lutte pour les droits civiques des Afro-Américains menée par son illustre père.

«Le rêve est loin d'être réalisé (...) les pleurs de la mère et du père de Trayvon Martin nous rappellent que bien trop souvent la couleur de la peau reste un permis pour le délit de faciès, pour arrêter et même pour assassiner», a-t-il martelé, en référence à l'adolescent noir tué en 2012 en Floride par un vigile, George Zimmerman.

L'acquittement en juillet de cet Américain hispanique avait provoqué des manifestations de colère à travers les États-Unis.

S'exprimant à la tribune en arborant un t-shirt à l'effigie de Barack Obama, premier président noir des États-Unis, la mère de Trayvon, Sybrina Fulton, a souligné: «Trayvon Martin était mon fils, mais il n'est pas simplement mon fils, il est notre fils à tous, et nous devons nous battre pour nos enfants».

«La marche (de MLK) est à présent notre marche et elle doit continuer. Aujourd'hui nous regardons le travail qui reste inachevé», a renchéri le ministre de la Justice Eric Holder, également afro-américain, tandis que la chef des démocrates à la Chambre des représentants, la politicienne blanche Nancy Pelosi, scandait: «Quand les gens de couleur réussissent, l'Amérique réussit».

«Arrêté 40 fois dans les années 1960»

Témoignant de sa propre expérience, le représentant John Lewis, un Noir américain, a raconté: «J'ai été arrêté 40 fois dans les années 1960. Battu, en sang et inconscient, mais je ne suis pas fatigué, je ne suis pas las, je ne suis pas prêt à renoncer et abandonner. Je suis prêt à me battre et continuer à me battre et vous devez vous battre».

Parmi les milliers de pancartes brandies par des Noirs, des Blancs, des Hispaniques et des Asiatiques, on pouvait lire: «Nous marchons pour mettre fin au délit de faciès», «L'héritage du Docteur King: des emplois pas la guerre».

Pour Vera Peele, venue de l'Indiana, les États-Unis n'ont «pas progressé» depuis 50 ans. «Je dirais même qu'on a fait marche arrière ces 20 dernières années», dit-elle à l'AFP. Marjorie Ross, du Massachusetts, explique elle que sa grand-mère était à Washington fin août 1963. «Enfant, j'ai subi beaucoup d'injustices et je suis sûre que c'était à cause de la couleur de ma peau», accuse cette Noire américaine.

Plus de 150 000 personnes étaient attendues sur le National Mall, l'immense pelouse qui s'étend du Capitole au mémorial Lincoln. Il y a cinquante ans, le discours de MLK - assassiné en avril 1968 à Memphis par un Blanc - avait rassemblé près de 250 000 personnes devant le «Lincoln Memorial».

Sa fameuse litanie «I have a dream» («Je fais un rêve») est gravée sur les marches du monument à l'endroit précis où il avait parlé, à l'orée de la promulgation des lois sur les droits civiques par le président Lyndon Johnson en 1964 et 1965.

Washington fête jusqu'au 28 août cet anniversaire avec en point d'orgue un discours de Barack Obama au mémorial Lincoln.