Le procès très attendu de l'ex-caïd irlandais, James «Whitey» Bulger, 83 ans, s'est ouvert mercredi à Boston, l'accusation décrivant un chef brutal n'hésitant pas à faire le sale travail, la défense affirmant qu'il n'a «jamais été un informateur du FBI».

Bulger, arrêté en juin 2011 après une cavale de 16 ans, est accusé de 19 meurtres, mais aussi d'extorsion, blanchiment d'argent et trafic d'armes. Son rôle présumé d'informateur du FBI pendant des années met la police fédérale dans une position très inconfortable.

Ce procès est celui «du crime organisé, de la corruption publique et de toutes sortes d'activités illégales», a déclaré d'entrée mercredi le procureur Brian Kelly, dénonçant «un groupe de criminels fous furieux qui ont sévi pendant 30 ans» à Boston avec «au centre, un homme», Bulger.

Détails sordides à l'appui, le procureur a décrit un parrain de la pègre irlandaise qui n'hésitait pas à faire «le sale travail», étranglant, mutilant ou tuant par balle ceux qu'il considérait comme des rivaux, des informateurs ou des témoins gênants.

«Bulger aimait nourrir le mythe qu'il ne faisait pas de trafic de drogue», mais lui et son gang «se sont fait beaucoup d'argent en vendant de la drogue, notamment de la cocaïne», a également déclaré le procureur.

Et il a ajouté que Bulger était devenu informateur du FBI pour protéger ses affaires. Cette coopération, pour faire tomber les gangs rivaux, aurait duré de 1975 à 1990.

L'ancien patron du gang de Winter Hill, qui a figuré pendant des années sur la liste des fugitifs les plus recherchés par la police fédérale, a écouté sans mot dire, vêtu d'une veste verte.

«Jamais un informateur» du FBI

J.W Carney, pour la défense, a ensuite pris la parole, cherchant à semer le doute sur les meurtres imputés à Bulger en soulignant la dangerosité de ses associés. Et il a aussi mis en cause la crédibilité de certains témoins de l'accusation, dont son ancien complice Stephen Flemmi qui, condamné à la réclusion à perpétuité, doit témoigner à charge.

«Avec leur passé, pourrez-vous les croire au-delà du doute raisonnable?», a-t-il demandé aux jurés.

Mais il a surtout évoqué le lien particulier de Bulger avec le FBI, et notamment avec un agent depuis retraité, John Connolly, qui était selon lui à l'époque le «golden boy» du FBI, et auquel Bulger aurait versé des dizaines de milliers de dollars.

«Est-ce qu'un informateur paierait des dizaines de milliers de dollars à un agent? Ne serait-ce pas plutôt le contraire?», a demandé l'avocat, affirmant que le «dossier» de Connolly contre Bulger avait été «fabriqué».

«Bulger n'a jamais été un informateur», a-t-il répété à plusieurs reprises, soulignant qu'il était d'origine irlandaise, et que c'était «la pire chose» qu'il aurait pu faire.

Un total de 32 chefs d'inculpation sont retenus contre Bulger qui a plaidé non coupable.

Le procès, présidé par la juge Denise Casper, pourrait durer jusqu'en septembre.

Disparu fin 1994, Bulger avait été arrêté en Californie en juin 2011, où il vivait depuis des années sous un faux nom avec sa compagne Catherine Greig.

L'ex-chef de clan bostonien, qui avait commencé sa «carrière» à 14 ans, a inspiré le personnage incarné par Jack Nicholson dans le film The Deported de Martin Scorsese, et de nombreux livres lui sont consacrés.

Des dizaines de témoins sont attendus à la barre durant le procès, et près de 1000 éléments devraient être présentés.

Les premiers témoins ont commencé à s'exprimer mercredi.