L'Agence nationale de sécurité américaine (NSA) et le FBI ont accès aux serveurs de neuf géants américains de l'internet, dont Microsoft, Yahoo!, Google et Facebook, pour y surveiller les activités d'étrangers, ont révélé le Washington Post et le Guardian jeudi.

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Le quotidien américain Washington Post a été contacté par un ancien employé du renseignement qui a fourni des documents, dont une présentation PowerPoint de formation décrivant le partenariat entre l'agence d'espionnage NSA et les sociétés internet.

Le programme secret, au nom de code «PRISM», est en place depuis 2007 et permet à la NSA de se connecter aux serveurs des entreprises, via un portail, pour consulter des informations sur des utilisateurs dont il existerait des éléments permettant de penser «raisonnablement» qu'ils sont à l'étranger, le tout sans ordonnance de justice.

La loi américaine protège ses citoyens d'une surveillance faite sans ordonnance, mais les personnes hors du territoire ne bénéficient pas de cette protection et peuvent être espionnées en toute légalité.

Selon le journal, «les analystes qui utilisent le système sur un portail internet à Fort Meade (une base militaire près de Washington, ndlr) doivent entrer des "sélecteurs", ou mots-clé de recherche, de façon à ce que la probabilité que la cible soit étrangère dépasse 51%».

Skype, AOL, YouTube, Apple et PalTalk participeraient également au système, et la plate-forme d'hébergement de fichiers Dropbox devrait être ajoutée prochainement.

Selon le Guardian, la NSA peut consulter «les courriers électroniques, les chats vidéo et audio, les vidéos, les photos, les chats comme Skype, les transferts de fichiers, les détails des réseaux sociaux, et plus».

Les communications par Skype peuvent être espionnées en direct.

Il s'agit de «l'un des accès les plus riches (...) pour la NSA», est-il écrit sur le document PowerPoint, selon le Guardian. Plus de 77 000 rapports de renseignements ont ainsi cité PRISM.

Cet espionnage a été permis par une loi votée pendant le mandat de George W. Bush, et renouvelée et promulguée par Barack Obama en décembre 2012, malgré l'inquiétude d'élus face à cette carte blanche donnée à la NSA.

«Une expérience directe de ces systèmes et un sentiment d'horreur face à ses possibilités a poussé un officier du renseignement à fournir la présentation PowerPoint sur PRISM et d'autres documents au Washington Post pour révéler ce qu'il estime être une intrusion choquante dans la vie privée», écrit le Washington Post.

«Ils peuvent vraiment voir vos idées se former au fur et à mesure que vous les tapez», a confié cet officier au journal.

Ces révélations suivent celles du quotidien britannique sur un autre programme conduit par la NSA, grâce auquel l'agence d'espionnage recueille la totalité des relevés téléphoniques des abonnés de l'opérateur Verizon.

Les sociétés internet nient

Apple et d'autres géants américains de l'internet ont nié jeudi avoir permis aux services de renseignement d'accéder à leurs serveurs pour récupérer des données sur les utilisateurs.

«Nous n'avons jamais entendu parler de PRISM», a affirmé le porte-parole du groupe Apple Steve Dowling.

«Nous ne fournissons aucun accès direct à nos serveurs à des agences gouvernementales, et toute agence de ce type recherchant des données sur un client doit obtenir un mandat judiciaire», a-t-il ajouté.

Le réseau social Facebook a lui aussi démenti ces accusations jeudi. «Nous ne fournissons à aucune organisation gouvernementale un accès direct aux serveurs Facebook», a affirmé Joe Sullivan, responsable de la sécurité du groupe.

Quand les autorités font des demandes de recherches d'informations, «nous regardons de près la conformité au droit de telles requêtes, et ne fournissons des informations que dans les cadres requis par la loi», affirme-t-il.

Google a répondu dans un communiqué aux deux journaux qu'il n'existait pas de «porte d'entrée cachée» à ses serveurs pour les services fédéraux.

Le géant de Seattle (nord-ouest) Microsoft a pour sa part affirmé: si le gouvernement menait un tel programme «volontaire pour rassembler des données sur des utilisateurs, nous n'y participons pas».

Également visé, le groupe de la Silicon Valley Yahoo! a nié procurer un accès direct à ses utilisateurs au gouvernement.