Frôler les dates butoirs devient décidément une habitude à Washington. Sans une nouvelle loi, le taux des prêts étudiants doublera le 1er juillet, une hausse considérable pour les sept millions de jeunes qui emprunteront cette année à l'État fédéral pour financer leurs études.

En 2012, les parlementaires américains avaient voté le gel des taux in extremis, deux jours seulement avant leur augmentation. Cette année, ils semblent encore prêts à employer la stratégie de la corde raide.

L'enjeu dépasse le seul porte-monnaie des étudiants et devrait transformer l'affaire, apparemment triviale, en l'un des dossiers politiques les plus brûlants du mois de juin.

Car la dette étudiante pèse désormais près de 1000 milliards de dollars, selon la Réserve fédérale de New York, soit plus que la dette totale des cartes de crédit américaines. Après les emprunts immobiliers, c'est la deuxième source d'endettement aux États-Unis.

Rares sont les Américains qui ne sentent pas concernés. Barack et Michelle Obama n'ont remboursé leurs prêts étudiants... qu'en 2004. Au total 37 millions d'Américains continuent à rembourser des emprunts étudiants.

Pour les partisans d'un taux faible, il est impératif de maintenir un taux avantageux pour ceux qui s'apprêtent à entrer sur le marché du travail.

«Il faut que les prêts restent abordables et que les jeunes puissent financer leurs études, car ensuite ils pourront acheter une maison, acheter une voiture et devenir des moteurs de la croissance économique», dit Anne Johnson, du groupe de réflexion Center for American Progress.

Taux du marché

Aux États-Unis, l'université dure en général quatre ans et la scolarité coûte de 2000 à 40 000 $ par an environ selon les établissements, en incluant les bourses.

Deux étudiants sur trois finissent leurs études endettés, selon le rapport annuel de l'Institute for College Access and Success : en moyenne, de 26 600 $ pour les diplômés de 2011.

Ces emprunts ne sont plus accordés par les banques, dans leur grande majorité, mais directement par l'État fédéral, à un taux défini dans la loi : 3,4 % depuis 2011 pour les étudiants indépendants, sous conditions de ressources (6,8 % pour les autres et les parents).

Mais ce taux va expirer : il grimpera à 6,8 % pour tous les prêts accordés après le 1er juillet.

Les républicains et le président Barack Obama veulent chacun que le taux des futurs emprunts dépende des cours du marché, aujourd'hui exceptionnellement bas, mais la formule préférée par les républicains conduirait à un taux plus élevé (5 % en 2014, selon une estimation du Bureau du budget du Congrès) que dans la version de la Maison-Blanche (environ 3,4 % en 2014).

Autre différence majeure : chez Barack Obama le taux du prêt, une fois accordé, resterait fixe jusqu'au dernier remboursement, 10 ou 20 ans plus tard. Les républicains, eux, préfèrent qu'il soit recalculé chaque année, ce qui permettrait aux jeunes actifs de profiter d'une éventuelle baisse des taux, mais les exposerait aussi à une hausse de leurs traites en cas d'envolée des taux.

«Ce n'est pas intelligent», a critiqué Barack Obama vendredi dans un discours à la Maison-Blanche. «Cela élimine les garde-fous pour les familles à bas revenus. Ce n'est pas juste».

Après l'adoption le 23 mai par la Chambre des représentants de la version républicaine de la réforme, les débats de juin se concentreront au Sénat, contrôlé par les alliés démocrates du président. Il leur reste moins d'un mois pour définir les taux de la prochaine rentrée universitaire.