La Californie est le potager de l'Amérique du Nord. L'État produit près de la moitié des fruits et légumes consommés aux États- Unis et son principal client à l'exportation est le Canada. Or, de plus en plus de chercheurs croient que les changements climatiques mettent en danger ce moteur agricole de 43 milliards de dollars, rapporte notre correspondant.

L'un des plus grands potagers du monde s'étire jusqu'à l'horizon sur plus de 600 kilomètres, le long de l'autoroute 5, qui relie Los Angeles et San Francisco.

Des panneaux invitent les gens à venir goûter aux récoltes locales. Pêches, bleuets, nectarines, amandes, avocats, endives, olives, kiwis : tout semble pousser en Californie.

En 2011, les 41 500 fermes de l'État ont vendu pour 43 milliards de produits agricoles, allant du lait de brebis aux vins de la Napa Valley, un record. Or, l'équilibre qui permet cette abondance pourrait bientôt être bouleversé et mettre en péril l'existence même de l'agriculture dans l'État.

« Je crois que bien des gens sousestiment les dangers qui nous guettent », explique Renata Brillinger, directrice générale de la fondation California Climate and Agriculture Network (CalCAN).

La CalCAN vient de conclure son sommet annuel sur le climat, où des agriculteurs et des scientifiques ont fait part de leurs plus récents constats.

En février, le département fédéral de l'Agriculture a dévoilé un rapport alarmant sur l'effet des changements climatiques sur l'agriculture, dans lequel le gouvernement qualifie les risques de « sans précédents ».

Pour Mme Brillinger, les agriculteurs et le gouvernement sont mal équipés pour affronter la situation. « Nous aimons régler les problèmes visibles : les pots d'échappement des voitures, ou les émissions des usines. Mais l'agriculture est basée sur le monde biologique, qui est riche et complexe. »

En 2009, le secrétaire de l'Énergie de l'époque, Steven Chu, avait déclaré : « Je ne crois pas que le public américain comprenne, au niveau viscéral, ce qui pourrait se passer [en raison des changements climatiques].

Nous faisons face à un scénario où il n'y a plus d'agriculture en Californie. » Pour l'État, la principale inquiétude est l'eau utilisée par les agriculteurs, qui vient surtout de la fonte des neiges dans les montagnes de la Sierra Nevada.

Une étude du groupe indépendant Union of Concerned Scientists a démontré qu'en 2050, les réserves saisonnières de neige dans ces montagnes pourraient être réduites de moitié. En 2100, les scientifiques croient qu'elles pourraient être réduites de 90 % par rapport aux mesures de 1990.

Des hivers trop chauds nuisent également aux récoltes. «Nous avons déjà des agriculteurs qui nous disent que leur production est en baisse, car il n'a pas fait assez froid cet hiver, dit Mme Brillinger. Nous entrons dans une ère où il n'y a pas de mode d'emploi. »