Dix jours après la tuerie de Newtown, le Journal News, quotidien de la banlieue nord de New York, a provoqué une controverse nationale en publiant les noms et les adresses de 33 614 détenteurs de permis de port d'armes des environs. Malgré les menaces qui l'ont forcée à embaucher des gardes armés, la direction du journal se bat ces jours-ci pour identifier d'autres détenteurs d'armes. Et au moins un média américain lui a emboîté le pas cette semaine.

Donald Trump. Howard Stern. Sean Hannity. Ces noms bien connus du public américain font partie d'une liste de détenteurs de permis de port d'armes à New York. Longue de 446 pages, cette nomenclature a été publiée mardi par le site internet Gawker sous un titre plutôt cru: «Voici une liste des trous de cul qui possèdent des armes à feu à New York».

Le titre a été modifié par la suite, mais l'intention de Gawker est demeurée la même: manifester sa solidarité avec le Journal News, un quotidien de la banlieue nord de New York qui se trouve au coeur d'une controverse nationale après avoir publié une liste semblable, et dénoncer les responsables new-yorkais qui refusent d'obéir à la loi sur les armes de poing.

«Les parlementaires de l'État ont décidé qu'ils voulaient que les New-Yorkais soient capables de savoir qui possède des armes de poing dans leurs communautés», déclare John Cook, le journaliste de Gawker qui a obtenu en 2010 une liste des détenteurs de permis de port d'armes à New York grâce à la loi sur l'accès à l'information.

«J'avais cette liste [et je l'ai publiée] afin de démontrer que le comté de Putnam enfreint la loi», ajoute-t-il.

Les responsables du comté de Putnam, faut-il le préciser, refusent d'accéder à la demande du Journal News de rendre publics les noms et les adresses des détenteurs de permis de port d'armes locaux. Le 24 décembre, le quotidien de la chaîne Gannett a soulevé un tollé chez les amateurs d'armes à feu aux États-Unis en publiant les noms et les adresses des 33 614 détenteurs de permis d'armes de poing dans les comtés de Westchester et de Rockland (un permis n'est pas requis pour les carabines ou les fusils de chasse).

Le journal a obtenu la liste grâce à la loi sur l'accès à l'information. Sa décision de la publier a valu des menaces à son personnel et mené sa direction à embaucher des gardes armés pour protéger ses bureaux. Des blogueurs ont également publié les adresses de plusieurs journalistes du quotidien, y compris celles des écoles fréquentées par leurs enfants.

Mais Dwight Worley, le journaliste par qui le scandale est arrivé, ne regrette rien. «Les gens ont autant le droit de savoir qui possède des armes à feu dans leurs communautés que les détenteurs d'armes ont le droit d'en posséder», a-t-il confié au New York Times, en exprimant une opinion à laquelle souscrit sa patronne, Janet Hasson.

«Nous savions que la publication des données serait controversée. Mais nous étions convaincus de l'importance de partager cette information après la fusillade de Newtown», a-t-elle déclaré.

Le greffier du comté de Putnam, Dennis Sant, est loin de partager cette conviction.

«Je suis un homme qui prend à coeur la primauté du droit. Mais il n'est plus question ici de la primauté du droit», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse le 3 janvier. «Nous parlons d'une initiative qui met en danger les citoyens.»