Augmenter les impôts ou s'entêter contre cette option quitte à aller droit dans le mur? Tel est le dilemme des républicains dans les négociations budgétaires qui accaparent le tout Washington depuis des semaines, alors que le compte à rebours affiche 24 jours.

La base du parti refuse qu'on touche un cheveu du barème d'imposition. Le président Barack Obama refuse de signer un accord sans retouche des impôts des riches. Au milieu, une majorité d'Américains veut faire payer davantage cette catégorie de contribuables. L'impasse semble totale.

Pour le président de la Chambre des représentants, le républicain John Boehner, c'est la crédibilité du parti qui est en jeu: il doit montrer que les républicains ne sont pas qu'une force d'obstruction, et qu'ils sont capables de contribuer à l'assainissement des finances publiques de façon constructive.

«Dire que Boehner se trouve entre le marteau et l'enclume minimise le problème auquel il est confronté», explique à l'AFP Tobe Berkovitz, consultant politique et professeur à l'Université de Boston.

«Il essaie de maintenir à flot la popularité des républicains, et en même temps d'empêcher les ultra-conservateurs du Tea Party d'abandonner complètement le parti», analyse-t-il.

En cas d'échec des négociations, les Américains ont tranché: la responsabilité retomberait sur les républicains pour 53% des personnes interrogées par l'institut Pew, contre 27% qui accuseraient les démocrates.

Barack Obama et ses opposants doivent forger un compromis avant le «mur budgétaire» du 2 janvier, cette échéance automatique rendue inévitable par une loi de 2011 et visant à réduire, coûte que coûte, les déficits. Les impôts augmenteraient pour presque tous les ménages, et les dépenses seraient rabotées.

Seul un nouveau vote du Congrès, divisé entre démocrates et républicains, peut permettre d'éviter le «mur».

Tabou brisé

Les discussions, au moins officiellement, sont au point mort entre Barack Obama et M. Boehner, qui négocie seul avec le président.

Les deux hommes se sont rencontrés dimanche à la Maison-Blanche. Mais si aucun détail n'a filtré, «les lignes de communication restent ouvertes», a indiqué le porte-parole de M. Boehner.

«Notre chef est dans une position incroyablement difficile», admet Trent Franks, un des élus les plus conservateurs du parti républicain, sur la radio NPR.

«Il fait ce qu'il peut», ajoute l'élu. «Cela ne veut pas dire que je soutiendrai forcément l'accord auquel il parviendra. Je ne sais pas encore».

Mais le tabou des hausses d'impôts semble brisé.

John Boehner lui-même a proposé 800 milliards d'augmentation des recettes sur 10 ans, qui pourraient selon lui être tirées de la suppression de niches fiscales dont jouissent aujourd'hui les plus riches. Un arrangement qui revient à augmenter les impôts sans toucher au barème sacré. Mais la Maison-Blanche a rejeté ce plan qui n'exige pas assez des plus fortunés.

De nombreux autres républicains vont plus loin en proposant d'accepter l'offre de Barack Obama: le maintien des taux actuels pour 98% des Américains, et une augmentation pour les 2% les plus riches.

«Le président Obama a la main haute sur les négociations», a reconnu le sénateur républicain Ron Johnson, sur Fox News. «S'il veut augmenter les impôts ou le barème d'imposition, je ne vois pas comment les républicains vont pouvoir l'en empêcher».

Céder sur ce point pourrait permettre aux républicains d'obtenir des concessions sur les programmes sociaux, très coûteux et dont la croissance est la plus grande menace sur l'équilibre budgétaire américain.

Le système public de retraite (Social Security) et l'assurance-maladie pour les plus de 65 ans (Medicare), tous deux gérés et financés par l'État fédéral, sont en déficit.

Barack Obama a laissé entendre que ces programmes pourraient être réformés, malgré l'opposition de la gauche de son parti. Mais seulement si John Boehner capitule définitivement sur le taux de l'impôt des plus riches.