La Cour suprême des États-Unis s'est penchée lundi sur la responsabilité des employeurs en cas de harcèlement sexuel, moral ou racial sur le lieu de travail, qu'il soit perpétré par un supérieur ou un autre employé influent.

Les neuf sages se sont demandé quelle définition donner à la fonction de «supérieur» hiérarchique, pour savoir s'il faut entendre seulement les rares salariés habilités à embaucher ou licencier dans l'entreprise, ou s'il faut l'élargir au personnel qui a le pouvoir de gérer le quotidien d'autres employés (emploi du temps, tâches à accomplir).

Selon la loi américaine, un employeur est responsable si un supérieur harcèle un subordonné, mais est exempt de toute poursuite judiciaire si le harcèlement a lieu entre deux employés de même niveau hiérarchique, à moins de s'être montré «négligent» et d'avoir fermé les yeux.

Pour répondre à cette question, la plus haute juridiction du pays a examiné un cas de harcèlement racial, dont l'employée noire d'une université de l'Indiana, Ball State University, s'est dite victime.

Maetta Vance travaillait au service de restauration de l'université où elle dit avoir été harcelée par une autre employée blanche, Saundra Davis, qui l'avait insultée avec des références au Ku Klux Klan et avait fait «de sa vie un enfer», selon sa plainte.

La Cour d'appel de Chicago avait estimé en juin 2011 que l'université ne pouvait pas être poursuivie car la négligence n'avait pas été prouvée, et parce que Mme Davis n'était pas la supérieure de la plaignante dans la mesure où elle n'avait pas le pouvoir de l'embaucher ou de la licencier.

«Il est clair que Mme Davis n'était pas qualifiée en tant que supérieure», a déclaré à l'audience Gregory Garre, l'avocat de l'université, en réclamant la confirmation du jugement d'appel.

«Mme Davis lui disait ce qu'elle devait faire et ne pas faire, elle donnait les ordres à la cuisine», a précisé de son côté Daniel Ortiz, avocat de la plaignante.

Elle pouvait lui demander «d'émincer des oignons toute la journée», a-t-il dit en réponse au juge Samuel Alito, ou encore de «nettoyer les toilettes».

Le président de la haute Cour, John Roberts, s'est demandé si un employé chargé de choisir la musique sur un lieu de travail hypothétique pouvait être considéré comme un «supérieur» quand il dit à un autre employé: «si tu ne sors pas avec moi, je vais mettre de la musique country toute la journée alors que je sais que tu n'aimes pas ce genre de musique». Il a ajouté que «cela affectait les activités quotidiennes d'un autre employé».

«Est-ce que ce n'est justement pas l'autorité qui décide qui nettoie les toilettes ou quelle musique écouter?» s'est interrogé le juge Alito.

La Cour suprême rendra sa décision courant 2013. Elle pourrait faire jurisprudence sur la responsabilité des employeurs dans bien d'autres cas de harcèlement au travail.