Des centaines de personnes ont manifesté lundi à Sanford, en Floride, pour réclamer l'arrestation du meurtrier blanc d'un jeune Noir de 17 ans, un mois jour pour jour après les faits, une affaire qui a fait irruption dans la campagne présidentielle.

La marche était emmenée par les parents de la victime, Trayvon Martin, et les défenseurs des droits civiques Al Sharpton et Jesse Jackson.

«Cette affaire met en exergue les profondes inégalités raciales, et pas seulement chez les jeunes, et le délit de faciès qui sont de mise dans ce pays», a déclaré Jesse Jackson à l'AFP en pointant les secteurs les plus enclins selon lui à cette discrimination comme la justice, la police et les banques.

Le 26 février à Sanford, alors qu'il rentrait chez lui après avoir acheté des sucreries, Trayvon Martin, 17 ans, non armé, a été abattu par George Zimmerman, qui effectuait des rondes de surveillance dans son quartier, dans la banlieue d'Orlando (centre de la Floride).

Trayvon Martin était un «garçon très tranquille, cool et intelligent», a dit à l'AFP Tarah Dupuy, 17 ans, une camarade de classe de la victime.

«Ce qui est arrivé, c'est du racisme, et la seule chose que nous demandons, c'est que justice soit faite, qu'il y ait une enquête et que la loi s'applique», a déclaré Joel Escarment, 16 ans, un ami.

«Nous espérons avoir un soutien massif pour réclamer justice et demander l'arrestation de George Zimmerman», avait déclaré à l'AFP avant le début de la manifestation Rashad Robinson, président de ColorOfChange, une organisation de défense des Noirs américains.

M. Zimmerman, d'origine hispanique, avait été brièvement arrêté puis relâché après qu'il eut invoqué la légitime défense. Mais les circonstances des faits restent floues et l'enquête de la police de la ville a fait l'objet de vives critiques.

Malgré l'annonce du fait que le ministère de la Justice avait pris le dossier en main, l'affaire enflamme la Floride, où des manifestations ont lieu quotidiennement pour dénoncer un nouvel exemple de profilage racial, et le mouvement se propage à d'autres régions du pays.

Selon l'Orlando Sentinel lundi, M. Zimmerman a affirmé à la police que Trayvon Martin l'avait mis à terre d'un coup de poing et était ensuite monté sur lui pour lui cogner le visage sur le trottoir plusieurs fois.

M. Zimmerman ne s'est jamais exprimé publiquement sur les faits, mais le quotidien floridien assure avoir recueilli plusieurs témoignages confirmant sa version des faits.

Sur internet, une pétition demandant l'inculpation de M. Zimmerman avait dépassé dans la journée de lundi les 2 millions de signataires.

Le meurtre de l'adolescent noir s'est également immiscé dans la campagne présidentielle. «Si j'avais un fils, il ressemblerait à Trayvon», a déclaré vendredi M. Obama, premier président noir des Etats-Unis.

Rick Santorum, un des candidats à l'investiture du parti républicain pour la présidentielle du 6 novembre, a accusé le président Obama de «politiser» l'affaire.

«Les paroles prononcées par le président sont scandaleuses», a dénoncé Newt Gingrich, un autre candidat républicain, lors d'une interview radio. «Est-ce que le président suggère que si c'est un garçon blanc qui avait été tué, l'affaire n'aurait pas été aussi grave parce qu'il ne lui aurait pas ressemblé?».

La mort du jeune Noir a relancé le débat sur une loi votée en 2005 en Floride avec le soutien du lobby des armes, la NRA. Ce texte --appelé «Défendez-vous» par ses défenseurs, «Tirez d'abord» par ses détracteurs-- a assoupli les conditions d'exercice de la légitime défense.

Mais selon l'ancien gouverneur républicain de Floride Jeb Bush, la loi, qu'il avait promulguée, ne saurait s'appliquer en l'espèce. Ce texte a été conçu «pour que les gens puissent se défendre, pas pour qu'ils se mettent à poursuivre quelqu'un qui leur a tourné le dos», a-t-il déclaré dans le Dallas Morning News.