La secrétaire d'État Hillary Clinton a ajouté vendredi la voix de l'Amérique à celles, de plus en plus nombreuses, qui craignent que la longue répression en Syrie ne débouche sur une guerre civile.

«Je pense qu'il pourrait y avoir une guerre civile, avec une opposition très déterminée, bien armée et finalement bien financée», a-t-elle déclaré dans un entretien à la chaîne américaine NBC.

Cette action, a-t-elle ajouté, serait «sinon dirigée, du moins certainement influencée par des déserteurs de l'armée. Nous le voyons déjà, et nous n'aimons pas cela parce que nous sommes en faveur de manifestations pacifiques et d'une opposition non-violente».

L'évaluation de Mme Clinton contraste avec la prudence jusqu'alors observée par Washington.

L'administration américaine avait contesté, jeudi encore, l'évaluation faite par le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, selon lequel l'opposition syrienne faisait courir au pays le risque d'une «guerre civile».

M. Lavrov, représentant d'un gouvernement allié de longue date à la Syrie, en avait pris pour exemple l'attaque mercredi d'un centre des services secrets syriens à l'entrée de Damas par «l'Armée syrienne libre», une force d'opposition armée.

Un haut responsable de l'administration Obama avait estimé que parler de guerre civile «jouait en faveur» du président syrien Bachar al-Assad, qui assimile la contestation de son régime à l'action d'un «mouvement terroriste contre le gouvernement».

Mme Clinton a encore pris soin de souligner vendredi que c'était «le régime Assad», par sa violence exercée depuis des mois contre des manifestants dans l'ensemble pacifiques, qui avait poussé le peuple à «s'armer contre lui».

Alors que Moscou, qui dispose d'un droit de veto aux Nations unies, continue d'empêcher que le régime Assad soit condamné à l'ONU, Mme Clinton a veillé sur NBC à dissiper l'idée que Washington pourrait tenter d'obtenir le soutien de l'ONU à une intervention armée, du type de la zone d'interdiction aérienne qui avait été imposée au printemps en Libye.

«Personne ne souhaite ce genre d'action vis-à-vis de la Syrie. La Libye était une situation unique (...) Ce n'est pas applicable à la Syrie», a jugé la secrétaire d'État.

Sur ABC, une autre chaîne américaine, Hillary Clinton a apporté son soutien aux initiatives prises cette semaine pour isoler le régime par les États arabes et par la Turquie, puissant voisin de la Syrie, deux voix «qui ne peuvent pas être ignorées par Damas.

«Nous avons compris assez tôt que nous n'étions pas la voix la plus susceptible d'être entendue par les Syriens», a-t-elle expliqué, en soulignant que les liens commerciaux entre les États-Unis et la Syrie étaient très peu développés.

Les forces syriennes ont tiré pour disperser des milliers de manifestants hostiles au régime vendredi, tuant au moins douze civils, dont deux enfants, à la veille de l'expiration d'un ultimatum arabe sommant Bachar al-Assad de cesser la répression.

Outre les États-Unis, l'Iran, mais aussi la France et la Turquie, ont dit craindre une «guerre civile» alors que se multiplient les attaques de militaires dissidents parallèlement aux manifestations pacifiques.