Le Pentagone a recommandé mercredi le renvoi du principal suspect dans l'attentat de l'USS Cole en 2000 devant un tribunal militaire à Guantanamo, une première depuis la décision de Barack Obama de renvoyer de nouveaux accusés devant ces juridictions d'exception.

Abd-Al-Rahim Al-Nachiri, un Saoudien de 46 ans, est actuellement incarcéré dans la prison militaire américaine située sur la base navale de Guantanamo, à Cuba.

C'est la première fois que l'administration Obama demande formellement à ce qu'un détenu soit renvoyé devant un tribunal militaire d'exception.

Il revient dorénavant à l'autorité militaire présidant ces tribunaux d'exception de décider de renvoyer ou non l'accusé devant le tribunal et des charges dont il devra répondre.

Trois procès se sont tenus à Guantanamo depuis l'arrivée du président démocrate à la Maison-Blanche mais les procédures avaient commencé sous George W. Bush.

Entre-temps, Barack Obama et le Congrès ont réformé ces tribunaux ultra-controversés pour donner notamment davantage de droits à la défense. Le président américain, dont l'administration espère passer en jugement 33 des 172 détenus actuellement à Guantanamo, avait annoncé le 8 mars qu'il demanderait de nouveaux renvois afin d'organiser d'autres procès.

Début avril, le ministre américain de la Justice Eric Holder a annoncé que l'administration américaine demanderait à ce que les cinq hommes soupçonnés d'avoir organisé les attentats 11-Septembre soient eux aussi renvoyés devant ces tribunaux.

M. al-Nachiri est notamment accusé de complot en vue de commettre des actes de terrorisme, de meurtre en violation des lois de la guerre, d'acte de terrorisme et d'attentat contre des civils.

Le Pentagone pense que c'est lui qui a acheté le petit bateau et les explosifs utilisés dans l'attentat contre le navire militaire américain USS Cole qui avait fait 17 morts et 40 blessés en octobre 2000 au Yémen. Deux hommes sur cette petite embarcation s'étaient approchés du destroyer qui s'approvisionnait en carburant dans le port d'Aden avant de déclencher les explosifs.

Les procureurs militaires assurent qu'ils réclameront la peine de mort.

Arrêté fin 2002, M. al-Nachiri a - comme 13 autres hommes - disparu pendant des années dans des prisons secrètes de la CIA avant de réapparaître à Guantanamo en septembre 2006. Il a demandé en septembre 2010 au parquet polonais une enquête sur des tortures qu'il dit avoir subies dans une prison secrète de la CIA, en Pologne.

De fait, une condamnation ne sera pas évidente à arracher pour le Pentagone, car le Saoudien a été lourdement maltraité pendant ses années de détention au secret.

Selon des documents officiels rendus publics en août 2009, il a subi des dizaines de séances de simulation de noyade, une technique d'interrogatoire assimilée à de la torture.

Il a également été menacé d'un revolver pointé sur sa tête puis d'une perceuse électrique. «L'interrogateur est entré dans la cellule et a allumé la perceuse pour effrayer le détenu qui se tenait nu, une cagoule sur la tête», assurait l'Inspecteur général de la CIA dans un rapport portant sur la période 2001-2003, en précisant que la perceuse ne l'avait jamais touché.

Une autre fois, un traducteur lui a affirmé: «nous pouvons faire venir ta mère ici» et «nous pouvons faire venir ta famille ici» alors que la rumeur courait au Moyen-Orient que les techniques d'interrogatoires impliquaient le viol, devant les détenus, des femmes de leur famille.