Le condamné à mort américain Hank Skinner a fait lundi un pas de plus vers la réalisation de tests ADN pour prouver son innocence dans un triple meurtre, en obtenant le feu vert de la Cour suprême pour poursuivre sa bataille judiciaire contre le Texas.

La plus haute juridiction des États-Unis a tranché lundi en faveur du condamné à mort en l'autorisant à saisir un tribunal fédéral pour contester le refus du Texas (sud) de le laisser effectuer, à ses frais, des tests ADN qui pourraient selon lui prouver son innocence.

Hank Skinner, 48 ans, marié à une Française, a été condamné à mort pour le triple meurtre en 1993 de sa compagne, battue à mort, et des deux fils de celle-ci, poignardés. Il a toujours affirmé qu'il n'était pas l'auteur des crimes.

Contactée par l'AFP, sa femme Sandrine Ageorge-Skinner a assuré s'être «effondrée en larmes» en apprenant la nouvelle. «Cette attente a été franchement insupportable», a expliqué cette militante anti-peine de mort jointe par téléphone en France. La Cour suprême avait examiné le dossier le 13 octobre 2010.

«Nous sommes impatients de démontrer devant le tribunal fédéral que le refus inexplicable du Texas d'accorder à Hank Skinner un accès aux tests ADN est injuste et ne peut pas rester en l'état», a affirmé de son côté Robert Owen, un des avocats du condamné, dans un communiqué.

Dans sa décision à six voix - dont deux de ses plus éminents juges conservateurs - contre trois, la Cour a rappelé que «le succès de ce recours (devant le tribunal fédéral) ne donnerait au condamné que la possibilité d'effectuer des tests ADN». «En aucun cas», précise-t-elle, la simple obtention de ces tests n'établit «l'illégalité de la détention».

Cette décision «n'est qu'une étape dans la procédure, il y a encore beaucoup d'étapes avant que Hank Skinner puisse être libéré ou même obtenir des tests ADN», a analysé pour l'AFP Richard Dieter, directeur du Centre d'informations sur la peine de mort.

«Elle ne fait que lui garantir le droit de se battre en justice, et au moins, il est vivant pour le faire», a-t-il ajouté.

Enfermé depuis plus de 15 ans dans le couloir de la mort, Hank Skinner a échappé le 24 mars dernier in extremis à son exécution. Le sursis de la Cour suprême était tombé quarante-cinq minutes avant l'heure de l'injection mortelle.

«On peut être partis pour plusieurs années», a confirmé Mme Skinner, en assurant que les «cours texanes sont très souvent en opposition avec la Cour suprême». Elle a même évoqué la possibilité que le Texas fixe une nouvelle date d'exécution à un moment de la procédure.

La ministre de la Justice du Texas, Lynn Switzer refuse de fournir les échantillons de taches de sangs et de particules relevées sous les ongles de la victime au motif que l'avocat du condamné avait refusé qu'ils soient analysés au moment du procès en 1995.

L'accusation avait alors démontré la présence de l'accusé sur les lieux du drame, c'est-à-dire chez lui, un fait qu'il ne conteste pas. Mais il assure que seul un tiers a pu agir puisqu'il était évanoui lorsque les crimes ont été perpétrés. La présence d'un cocktail d'anxiolytiques, d'antidouleurs et d'alcool dans son organisme avait été confirmée par une prise de sang.

Sa femme avec laquelle il a commencé à correspondre en 1996 et qu'il n'a pas droit de voir a assuré à l'AFP qu'il était «très fragile psychologiquement et nerveusement» depuis qu'il a failli être exécuté.

Elle ne pouvait dire s'il avait été prévenu lundi de la décision de la Cour suprême. «La prison lui pourrit la vie en ce moment», a-t-elle expliqué. «On fait tout pour qu'il dégoupille, parce que ça aurait été tellement bien, avant cette décision, de dire qu'il était violent, dangereux, qu'il avait attaqué un gardien».