Pas moins de 80% des mosquées américaines sont dirigées par des extrémistes. Les dirigeants musulmans ne collaborent jamais aux enquêtes policières sur le terrorisme aux États-Unis. Et quand ce pays entre en guerre, les musulmans américains ne sont pas aussi patriotiques que les membres des autres groupes religieux ou ethniques.

Peter King, l'homme qui professe ces opinions contestées, est le nouveau président de la commission à la Sécurité intérieure à la Chambre des représentants. À ce titre, le républicain de Long Island tiendra mercredi la première d'une série d'auditions sur la «radicalisation de la communauté musulmane» aux États-Unis, une initiative qui lui vaut d'être comparé au sénateur Joseph McCarthy, responsable de la chasse aux sorcières anti-communiste du Congrès dans les années 1950.

«Cibler un groupe d'Américains en fonction de leur religion afin de les soumettre à une investigation gouvernementale est une erreur qui sèmera la discorde», peut-on lire dans une lettre envoyée au président républicain de la Chambre des représentants, John Boehner, par une coalition de 51 groupes religieux et de défense des droits civiques.

Les signataires de la lettre évoquent eux-mêmes les auditions de Joseph McCarthy, rappelant que «ce sombre chapitre de notre histoire nous a enseigné que le Congrès a un devoir solennel d'exercer son pouvoir d'enquête de façon responsable».

La réaction de Peter King?

«Je ne pense pas que cela mérite une réponse. Je suis trop occupé à préparer les auditions», a-t-il fait savoir dans un communiqué.

De son côté, le numéro deux de la commission à la Sécurité intérieure, le démocrate Bennie Thompson, a proposé en vain d'étendre les auditions à d'autres types d'extrémisme. «Il y a un éventail de groupes extrémistes américains qui sont plus répandus aux États-Unis que les extrémistes islamiques, y compris les néo-nazis, les extrémistes environnementaux, les groupes anti-taxes et autres», a-t-il écrit dans une lettre à Peter King.

Le représentant républicain justifie son enquête en citant notamment les noms de musulmans américains ayant été mêlés à des actes de violence ou des tentatives d'attentat au cours des dernières années. Figurent parmi ce groupe Nidal Malik Hasan, psychiatre de l'armée d'origine palestinienne, auteur présumé de la tuerie de Fort Hood, le 5 novembre 2009, et Najibullah Zazi, un Afghan d'origine qui a plaidé coupable en février 2010 de tentative d'attentat à la bombe dans le métro de New York.

L'élu de Long Island affirme en outre que les autorités policières se plaignent souvent de ne recevoir aucune collaboration de la part des dirigeants musulmans dans leurs enquêtes. Cette assertion est vivement dénoncée par les groupes musulmans américains, qui ont compilé une longue liste de complots terroristes ayant été déjoués à la suite de dénonciations issues de leur communauté. Deux universités de Caroline-du-Nord ont publié de leur côté l'an dernier une étude indiquant que des membres de la communauté musulmane avaient contribué à prévenir plus du tiers des complots attribués à Al-Qaeda aux États-Unis depuis le 11 septembre 2001.

Selon la même étude, les mosquées américaines jouent un rôle important pour contrer la radicalisation des jeunes musulmans, une conclusion qui contredit une des assertions de Peter King.

Les opinions les plus controversées du représentant républicain sont partagées par une partie non négligeable de la droite américaine. Le débat autour d'un projet de mosquée près de Ground Zero à New York a notamment contribué l'an dernier à déclencher une vague de rhétorique anti-musulmane aux États-Unis. À la Chambre des représentants, le nouveau représentant républicain de Floride Allen West est sans doute l'un des porte-parole les plus virulents de ce courant. Selon lui, l'islam est un «ennemi très vil et très vicieux».

La chaîne Fox News sert également de tribune à un autre pourfendeur de l'islam, Frank Gaffney, un ex-membre de l'administration Reagan. Selon lui, le mouvement islamique des Frères musulmans a déjà réussi à infiltrer et à influencer le gouvernement américain.

«Nous ne pouvons pas régler ça si nous ne comprenons pas que les Frères musulmans là-bas (en Égypte) et ici sont l'ennemi», a-t-il déclaré la semaine dernière lors d'une entrevue accordée à Sean Hannity, un des animateurs de Fox News.

Gaffney estime que la secrétaire à la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, fait partie des responsables américains qui subissent l'influence des Frères musulmans.

Curieux hasard, Napolitano sera la toute première personne à témoigner mercredi devant la commission de Peter King.