L'espoir du président Barack Obama de voir une abolition avant la fin de l'année de la loi interdisant aux soldats américains d'évoquer leur homosexualité a été refroidi par le Sénat qui a rejeté jeudi l'examen de la mesure.

Après plusieurs jours d'intenses négociations entre la majorité démocrate et les républicains, les sénateurs ont rejeté par 57 voix contre 40 une motion qui aurait permis d'ouvrir les débats sur un vaste projet de loi de finance du Pentagone contenant des mesures pour l'abolition du tabou gai dans l'armée.

Une majorité de 60 voix sur 100 était nécessaire pour adopter la motion.

Obama «extrêmement déçu»

Le président Obama s'est dit «extrêmement déçu» jeudi soir dans un communiqué.

Il s'agit d'un revers pour M. Obama qui a demandé au Congrès d'abolir avant la fin de l'année la loi dite «Don't ask, don't tell» (Ne rien demander, ne rien dire), adoptée en 1993, qui oblige les gays et lesbiennes de l'armée américaine à taire leur orientation sexuelle sous peine d'être renvoyés.

Le président a affirmé que «le vote de jeudi, bien que décevant, ne doit pas marquer la fin de nos efforts», et a appelé le Sénat à «réexaminer ce sujet important» avant les vacances de Noël.

Immédiatement après le vote, la sénatrice républicaine Susan Collins et le sénateur indépendant Joe Lieberman ont réuni une conférence de presse pour y annoncer le dépôt d'un projet de loi sur la seule abrogation de la loi «Don't ask, don't tell», sans le projet de loi de finance.

M. Lieberman a assuré qu'il avait parlé au chef de la majorité démocrate du Sénat Harry Reid et que celui-ci était d'accord pour procéder à l'examen du nouveau projet de loi avant Noël.

La porte-parole de M. Reid, Regan Lachapelle, a confirmé à l'AFP que «le sénateur Reid soutient cet effort». «Mais nous allons avoir besoin d'un soutien républicain significatif pour pouvoir progresser».

De leur côté, Mme Collins et M. Lieberman ont assuré que la mesure qu'ils déposaient aurait le soutien de plus de 60 sénateurs et pourrait être adoptée avant la fin de l'année.

Après le vote de jeudi, M. Reid a fustigé l'attitude des républicains. «Nous avons essayé tous les moyens possibles pour progresser sur ce sujet», a déclaré M. Reid jeudi devant le Sénat. «Et quand ils refusent de débattre, ils suspendent toutes les bonnes parties (du projet de loi) dont on a besoin de façon urgente», a-t-il dit.

L'opposition souhaitait un long processus d'amendement. Une option qui, selon les démocrates, n'aurait pas laissé le temps nécessaire pour l'examen du texte avant les congés de fin d'année.

Outre l'abolition de «Don't ask, don't tell», le projet de loi de finances du Pentagone contient d'importantes dispositions cruciales pour le fonctionnement de l'armée en temps de guerre.

Le plus haut gradé de l'armée américaine, l'amiral Michael Mullen, a indiqué la semaine dernière que les soldats américains étaient «prêts» pour l'abolition du texte controversé.

Une étude du Pentagone dévoilée peu avant montre que 70% des 115 000 militaires et 44 000 conjoints de militaires interrogées sont favorables à l'abrogation de la loi. Mais certains sénateurs essentiellement républicains craignent que l'abrogation de la loi ne menace l'efficacité des soldats au combat.

La Chambre des représentants avait déjà voté pour l'abolition de la mesure en mai par 234 voix contre 194.

Également attaquée sur le front judiciaire pour son caractère discriminatoire, la loi a conduit au renvoi de l'armée de quelque 14 000 soldats en raison de leur homosexualité, selon des sources associatives.