Le meneur présumé d'un groupe de soldats américains accusés d'avoir exécuté pour s'amuser des civils afghans, a été présenté mardi devant la justice militaire lors d'une audience préliminaire qui a révélé de nouveaux détails de la macabre affaire.

Le sergent Calvin Gibbs, assis entre ses deux avocats, a écouté calmement en ouverture d'audience la liste des chefs d'accusation, parmi lesquels meurtres avec préméditation, complot, obstruction de l'enquête et manquement au devoir.

«Sergent Gibbs, est-ce que vous comprenez ce qui vous est reproché?», a demandé le colonel Thomas Molloy, l'officier en charge de l'instruction, au cours de cette audience préliminaire qui se tenait sur la base militaire de Lewis-McChord.

«Oui, Monsieur», a répondu l'accusé.

Selon l'accusation, Calvin Gibbs, 26 ans, était le meneur au sein d'un groupe de cinq soldats qui auraient élaboré pour s'amuser des «scénarios» pour exécuter trois civils afghans début 2010 dans la province de Kandahar.

L'accusé aurait également passé à tabac un soldat qui avait alerté sa hiérarchie sur la consommation de hashish dans l'unité et les meurtres présumés. Le soldat en question, Justin Stoner, aurait été attaqué le 5 mai 2010 «avec les poings et à coups de pieds», selon le colonel Molloy.

À l'instar de plusieurs autres témoins, Justin Stoner a refusé de témoigner lors de l'audience, invoquant son droit au silence.

L'agent spécial Anderson Wagner, l'un des enquêteurs, interrogé par téléphone, a affirmé que Justin Stoner lui avait dit que l'un des membres de l'unité lui avait montré des os de doigts et «lui avait dit que s'il ne voulait pas finir comme la personne (à qui appartenait les os), il ferait bien de ne rien dire de ce qui se passait» dans l'unité.

Les débats se sont focalisés mardi sur la journée du 2 mai 2010, pendant laquelle, selon un autre accusé -- Jeremy Morlock, traduit devant la justice fin septembre et qui sera renvoyé en cour martiale -- le sergent Gibbs s'était caché derrière un muret pour lancer un grenade sur un civil afghan.

Morlock et un autre soldat de l'unité, Adam Winfield, avaient ensuite tiré sur l'Afghan comme s'ils ripostaient à une attaque, puis placé à côté de sa dépouille une grenade russe.

L'avocat du sergent Gibbs, Phillip Stackhouse, a mis en doute la véracité du témoignage du soldat, dont il a rappelé qu'il consommait de la drogue. Il a aussi essayé de convaincre le colonel Molloy que les victimes présumées présentaient une réelle menace.

Le supérieur direct de Gibbs, le lieutenant Stefan Moye, a entendu le 2 mai l'explosion de la grenade et les tirs qui ont suivi, avant de trouver sur place Morlock et Winfield, qui lui avaient assuré que la victime leur avait jeté une grenade.

«À ce moment, avez-vous eu le moindre doute quant à la légitimité de ce combat?», a demandé M. Stackhouse au lieutenant Moye.

«Non», a-t-il répondu.