Larry Kudlow, animateur à la chaîne financière CNBC, semblait être convaincu de la fiabilité de sa source. «J'ai soupé hier soir avec un personnage très haut placé qui m'a dit que Michael Bloomberg sera le prochain secrétaire du Trésor. L'accord a été conclu», a-t-il déclaré en ondes vendredi.

L'ancien économiste de Wall Street et membre de l'administration Reagan n'était pas le premier à évoquer un tel scénario. Depuis que le maire de New York a joué une ronde de golf avec le président Barack Obama dans l'île de Martha's Vineyard, en août, et reçu le vice-président Joe Biden à Gracie Mansion, sa résidence officielle, des rumeurs persistantes l'envoient à Washington.

De toute évidence, Michael Bloomberg a du mal à se faire comprendre. De sorte qu'il a dû répéter, après la prédiction de Larry Kudlow, ce qu'il dit depuis quelques semaines déjà: il ne souhaite pas remplacer l'actuel secrétaire du Trésor Timothy Geithner ou à occuper tout autre poste au sein de l'administration Obama.

En fait, la seule position qui l'intéresse à Washington, c'est celle de président, a-t-il confié récemment au New York Times, tout en rejetant l'idée d'une campagne à la Maison-Blanche.

Que veut-il alors?

Le milliardaire de 68 ans, qui en est à son troisième et dernier mandat à la mairie de New York, veut sans aucun doute jouer un rôle sur la scène politique nationale aux États-Unis. Au cours des dernières semaines, il a ainsi annoncé son appui à plusieurs candidats aux élections de mi-mandat et organisé à leur intention des activités de collecte de fonds.

Pragmatique

Les choix de Michael Bloomberg en disent long sur l'approche pragmatique de cet ancien baron des médias qui a été démocrate, puis républicain et enfin indépendant. Au-delà des étiquettes partisanes, il soutient des candidats centristes ou modérés qui sont capables selon lui d'arriver à des compromis et d'obtenir des résultats.

Il a notamment donné son appui au chef de la majorité démocrate au Sénat, Harry Reid, qui fait face, dans le Nevada, à la républicaine Sharron Angle, candidate ultraconservatrice soutenue par le Tea Party, ce mouvement de contestation populiste. Dans la course au poste de gouverneur de New York, il a également rejeté le candidat favori du Tea Party, le républicain Carl Paladino, préférant le démocrate Andrew Cuomo.

Mark Kirk, candidat à la course sénatoriale d'Illinois, et Meg Whitman, candidate au poste de gouverneur de Californie, figurent au nombre des républicains qui ont reçu ou qui recevront le soutien de Michael Bloomberg.

Cette campagne en faveur de candidats répartis aux quatre coins des États-Unis n'aurait rien d'étonnant de la part d'un politicien qui songe à briguer un jour la Maison-Blanche. En 2008, le maire de New York y a sérieusement pensé, mais a finalement annoncé sa décision de ne pas déclarer sa candidature après que John McCain eut pris une avance insurmontable dans la course à l'investiture républicaine. Selon les confidences de son entourage, il se serait présenté comme candidat indépendant si l'ancien gouverneur d'Arkansas Mike Huckabee avait remporté cette course. Il aurait pu, à son avis, attirer les votes des électeurs centristes dans une course à trois.

2012?

Il pourrait évidemment être tenté de faire le même calcul en 2012 si un Mike Huckabee ou une Sarah Palin remportait l'investiture républicaine pour l'élection présidentielle. Mais il se garde bien d'ouvrir la porte à une telle possibilité.

«Peux pas gagner», a-t-il répondu la semaine dernière à un journaliste qui lui demandait pourquoi il écartait d'emblée l'idée de faire campagne à la Maison-Blanche.

Ainsi donc, Michael Bloomberg se contenterait de tenter d'influer sur la politique nationale en appuyant tel ou tel candidat ou en disant le fond de sa pensée sur les sujets d'actualité, dont le Tea Party, qui n'est rien d'autre à ses yeux qu'une «vaguelette» passagère.

«Mais cette frustration que l'on sent aux États-Unis finira peut-être par forcer républicains et démocrates à s'asseoir à la même table et à travailler ensemble», a-t-il déclaré vendredi lors de son émission de radio hebdomadaire.

Et cette frustration, si elle n'aboutit pas à des changements satisfaisants, pourrait aussi changer les calculs de Michael Bloomberg concernant son avenir politique.