Le secrétaire à la Défense américain, le républicain Robert Gates, a annoncé hier dans un entretien au magazine Foreign Policy qu'il comptait prendre sa retraite l'an prochain. La question: cette fois-ci sera-t-elle la bonne?

Nommé en 2006 par George W. Bush et reconduit à son poste en 2009 par Barack Obama, le secrétaire à la Défense américain, le républicain Robert Gates, a annoncé très publiquement hier son désir de prendre sa retraite en 2011, une fois que la situation en Afghanistan aura été éclaircie.

«Je pense que dans le courant de l'année prochaine, je serai à même (...) de savoir si notre stratégie fonctionne en Afghanistan, a-t-il confié au magazine Foreign Policy. La stratégie d'envoi de renforts aura été achevée. Nous en aurons fait l'évaluation en décembre (2010). Et il me semble que dans le courant de 2011, il y aura logiquement un moment pour passer la main.»

Dans la même entrevue, il a également dit croire qu'il sera plus facile pour l'administration Obama de lui trouver un successeur l'an prochain qu'au printemps 2012, quand la campagne électorale pour la présidence battra son plein.

Ces remarques ont été publiées au moment où Robert Gates et le commandant des forces armées en Afghanistan, le général David Petraeus, ont tenu des avis divergents sur la date du début du retrait des troupes de ce pays.

Tandis que Gates a maintenu la date de juillet 2011, le général avait affirmé la veille à la télévision qu'il ne la considérait pas comme «contraignante». Ce différend n'est toutefois pas lié à l'annonce du départ du secrétaire à la Défense.

Pragmatique et modéré

Contrairement à bien de ses prédécesseurs qui ont dû être poussés vers la sortie, ce n'est pas la première fois que Robert Gates exprime son désir de quitter Washington.

Michael O'Hanlon, spécialiste des questions militaires au sein du centre de réflexion Brookings Institution de Washington, rappelle ainsi que Gates comptait prendre sa retraite après la défaite de George Bush et ne s'était engagé qu'à servir au moins un an de plus sous Barack Obama en janvier 2010.

«Je pense qu'il faut plutôt voir cette annonce comme un engagement à servir pour plus d'une année, ce qui excède les attentes de certains», souligne M. O'Hanlon.

Âgé de 66 ans, considéré comme pragmatique et modéré, Robert Gates a notamment été directeur de la CIA sous Bush père, avant de devenir secrétaire à la Défense en 2006 sous George W. Bush à la suite du départ controversé de Donald Rumsfeld.

Respecté tant chez les républicains que chez les démocrates, il a ensuite accepté la demande de Barack Obama de rester en poste. Certains analystes y avaient vu une manière pour le président américain de se protéger des attaques républicaines.

«Cela a peut-être aidé le président américain», reconnaît Michael O'Hanlon en soulignant le respect dont jouit Robert Gates tant auprès des militaires que des politiciens à Washington.

L'Afghanistan en héritage

En plus d'avoir supervisé l'envoi de troupes supplémentaires en Irak puis en Afghanistan, Robert Gates est également reconnu pour avoir partiellement restructuré les forces armées américaines et mis au rancart une trentaine de programmes militaires jugés superflus.

Contrairement à plusieurs commentateurs qui considèrent déjà Gates comme le secrétaire à la Défense le plus important depuis Robert McNamara, Michael O'Hanlon croit qu'il est encore trop tôt pour juger de l'héritage de Robert Gates. «Il va d'abord falloir voir ce qui va se passer en Afghanistan», conclut-il.

Hillary Clinton à la Défense?

Même si Washington est quelque peu déserté en ce mois d'août - vacances obligent -, plusieurs noms de successeurs potentiels à Robert Gates se sont rapidement mis à circuler dans la capitale américaine.

Le magazine Foreign Policy a lui-même mis de l'avant ceux de Michèle Flournoy, actuelle secrétaire adjointe à la Défense, Leon Panetta, directeur de la CIA, Richard Danzig, ancien secrétaire à la Marine et John Hamre, président du groupe de réflexion Center for Strategic and International Studies. Michael O'Hanlon, de la Brookings Institution, croit que Sam Nunn, ex-sénateur de la Géorgie et conseiller de Barack Obama, ainsi que John M. Spratt, représentant au Congrès de la Caroline-du-Sud, pourraient aussi être de bons candidats. D'autres suggèrent également qu'Hillary Clinton puisse être mutée des Affaires étrangères à la Défense, une possibilité jugée peu probable par Foreign Policy.