Le président américain Barack Obama a démis mercredi le général Stanley McChrystal de ses fonctions de chef des troupes alliées en Afghanistan après ses propos explosifs tenus dans la presse, tout en assurant que ce départ n'entraînerait pas de changement de stratégie.

Le général McChrystal, artisan de la stratégie afghane de M. Obama, sera remplacé par le général David Petraeus, un soldat très expérimenté actuellement commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan.

«Il s'agit d'un changement d'homme mais pas de politique», a souligné M. Obama.

Le président a affirmé ne pas avoir révoqué le général McChrystal en raison d'«insultes personnelles», mais parce que sa conduite n'avait pas été conforme aux critères requis. Lors d'une allocution à la Maison-Blanche, le président a réclamé de son équipe une «unité dans l'effort».

«Aussi difficile que ce soit de perdre le général McChrystal, j'estime que c'est la bonne décision à prendre pour notre sécurité nationale», a-t-il ajouté, non sans avoir rendu hommage à sa carrière «remarquable».

Mais il a aussi estimé que les propos du général avaient «érodé la confiance nécessaire pour que notre équipe travaille de concert à remplir nos objectifs en Afghanistan».

«J'accepte volontiers un débat dans mon équipe, mais je ne tolèrerai pas de division», a martelé le président, qui venait de participer à une réunion sur l'Afghanistan et le Pakistan. Selon un haut responsable, M. Obama y a mis en garde ses collaborateurs contre toute «mesquinerie».

Mercredi matin, M. Obama a reçu en tête-à-tête et pendant une demi-heure le général McChrystal, rappelé en urgence après la publication de ses propos désobligeants envers des membres de l'exécutif dans le magazine Rolling Stone.

Cet article revient sur les frictions apparues entre l'armée et la Maison-Blanche à l'automne, quand M. Obama mûrissait sa décision d'envoyer des renforts en Afghanistan. Le général dit avoir trouvé cette période «pénible».

Selon les propos retranscrits dans l'article, le général McChrystal et ses adjoints se sont aussi moqués du vice-président Joe Biden, connu pour son scepticisme face à sa stratégie en Afghanistan.

Le général, nommé il y a seulement un an à son poste par M. Obama, a assuré dans un communiqué qu'il avait démissionné par loyauté envers ses soldats et «pour voir la mission réussir», sans faire mention des déclarations qui ont provoqué sa perte.

Le président afghan Hamid Karzaï, qui avait manifesté son soutien mardi au général, respecte la décision de M. Obama, a annoncé son porte-parole, saluant en David Petraeus un «général expérimenté».

Agé de 57 ans, ce général quatre étoiles est considéré comme l'artisan de la stratégie gagnante des Etats-Unis en Irak. Sa nomination devra être confirmée par le Sénat, où peu de voix s'élevaient mercredi contre ce choix.

Pour le sénateur démocrate John Kerry, le choix du général Petraeus «apporte non seulement une continuité philosophique, mais aussi des compétences diplomatiques éprouvées».

En attendant une confirmation qui pourrait intervenir la semaine prochaine, le général britannique Nick Parker assurera l'intérim.

De son côté, le secrétaire général de l'Otan Anders Fogh Rasmussen, qui s'était exprimé en faveur du général McChrystal, a affirmé que la stratégie de l'alliance en Afghanistan restait inchangée.

Les tensions entre l'officier et l'exécutif américain sont apparues au grand jour au moment où les forces internationales sont engagées dans deux offensives cruciales face aux talibans dans le sud afghan et subissent de lourdes pertes: 290 militaires étrangers tués depuis le début de l'année, selon un décompte établi par l'AFP à partir du site indépendant icasualties.org.

Elles interviennent aussi alors que de plus en plus d'élus américains s'inquiètent d'un échec des opérations militaires et du retard d'une offensive dans la région de Kandahar (sud), fief des talibans.

En décembre dernier, M. Obama avait annoncé l'envoi de 30 000 soldats supplémentaires en Afghanistan, et fixé le début du retrait à juillet 2011. Le renvoi du général McChrystal pourrait faire peser un doute sur cet objectif.

Stanley McChrystal s'est rendu ce matin à la Maison-Blanche pour rencontrer le président.