Le président afghan Hamid Karzaï effectue à partir de lundi une visite de quatre jours à Washington pour resserrer des liens avec l'administration américaine, mis à mal ces derniers mois.

La rencontre entre le chef de l'État afghan et le président américain Barack Obama sera la première depuis le tollé provoqué par M. Karzaï lorsqu'il avait accusé les Occidentaux d'avoir orchestré les fraudes massives lors du scrutin présidentiel de l'été dernier.

M. Karzaï a quitté Kaboul dimanche, ont précisé dans la journée ses services. «C'est une visite d'une rare importance pour l'avenir des relations entre l'Afghanistan et les États-Unis, pour le partenariat stratégique entre nos deux pays, pour la guerre contre le terrorisme», a indiqué le chef de la diplomatie afghane, Zalmai Rasoul.

Une quinzaine de responsables afghans, dont dix ministres, accompagnent M. Karzaï. La délégation doit aussi rencontrer des membres du Congrès américain.

L'image du président afghan, installé au pouvoir avec l'aide de Washington après la chute des talibans fin 2001, a été sérieusement écornée par sa réélection, en novembre dernier, entachée de multiples irrégularités.

Mais après des échanges ces derniers mois où les États-Unis ont pu faire douter de leur soutien inconditionnel à M. Karzaï, l'heure est à l'unité alors que se profile une offensive délicate à Kandahar (sud), berceau des talibans et région d'origine du président afghan.

Pour ce faire, Barack Obama a demandé à ses principaux conseillers de mettre en sourdine leurs critiques envers M. Karzaï à partir de lundi, pour que les deux gouvernements puissent mieux se concentrer sur leur «but commun», la victoire contre les talibans, a indiqué un responsable de la Maison Blanche.

«Karzaï a besoin du soutien économique et politique des États-Unis. Cette visite est très importante pour lui au moment où on peut avoir l'impression qu'il a perdu le soutien de l'administration Obama», explique l'analyste politique afghan Waheed Mujda.

Les tensions entre Américains et Afghans avaient culminé quand le président afghan avait accusé les Occidentaux d'être responsables des fraudes en sa faveur lors du scrutin à l'issue duquel il a été réélu.

Washington avait fait planer la menace d'une annulation de la visite de M. Karzaï, avant que M. Obama ne lui réaffirme son soutien.

Depuis, les responsables américains à Kaboul, de l'ambassadeur au patron des forces internationales, le général américain Stanley McChrystal, s'attachent à présenter M. Karzaï comme un «partenaire fiable» dans la guerre contre l'insurrection talibane, où les 130 000 soldats étrangers, aux deux tiers américains, essuient des pertes de plus en plus lourdes au fil des années.

Le voyage de M. Karzaï intervient à quelques semaines d'une «jirga», une conférence de paix réunissant des centaines de chefs tribaux à Kaboul, prévue fin mai et au cours de laquelle le président afghan doit tenter de convaincre enfin les talibans d'accepter son programme de réconciliation.

Lundi, «Karzaï tentera de convaincre les États-Unis que la jirga est un pas dans la bonne direction et non pas un pas vers la talibanisation de l'Afghanistan», note Ahmad Sayeedi, analyste politique à Kaboul.

Mais le président afghan devra certainement s'expliquer sur les lenteurs à lutter contre la corruption, dans laquelle il est accusé d'être impliqué.

«Karzaï est bon pour une séance de questions difficiles au Congrès pendant sa visite», souligne M. Sayeedi. «Politiquement et diplomatiquement, son voyage sera présenté comme un succès dans les médias. Mais la réalité, c'est que les problèmes de l'Afghanistan sont compliqués».