Barack Obama à un tournant de son mandat: le président des Etats-Unis espère voir sa réforme du système de santé américain adoptée dimanche lors d'un vote crucial de la Chambre des représentants. C'est l'heure de vérité pour le chef de la Maison Blanche, venu en personne samedi au Capitole battre le rappel des troupes démocrates.

Le chef de la Maison Blanche ne peut compter que sur les parlementaires démocrates pour faire passer ce texte, la priorité de son mandat en politique intérieure, qui apportera une couverture de santé à quelque 32 millions d'Américains.

La réforme rencontre en effet l'opposition unanime des républicains, qui l'accusent de conduire à une mainmise gouvernementale sur le système de santé qui creuserait encore les déficits publics et entraînerait des hausses d'impôts. Certains démocrates eux-mêmes s'inquiètent du coût élevé du projet et des dispositions sur l'avortement.

Les responsables de la majorité démocrate, qui ont passé toute la journée de samedi à traquer frénétiquement les voix au Capitole, semblaient néanmoins confiants dans leur capacité à réunir les 216 voix nécessaires dimanche pour faire passer le texte.

«Je sais que c'est un vote difficile», a lancé Barack Obama samedi aux démocrates de la Chambre des Représentants lors d'une réunion au Capitole, se disant convaincu que ce vote se révélerait à terme comme la «chose intelligente à faire politiquement».

«Ne le faites pas pour moi, ne le faites pas pour le parti démocrate», a-t-il dit. «Faites le pour les Américains». «C'est entre vos mains», a ajouté le président. «Il est temps que vous adoptiez la réforme de santé pour l'Amérique et j'ai confiance en vous pour le faire demain».

Déterminé à obtenir le passage de ce projet-phare de son mandat, le président avait reporté cette semaine pour la seconde fois son voyage en Indonésie et en Australie, désormais prévu en juin.

Les Etats-Unis restent l'un des rares pays développés à ne pas offrir une couverture de santé globale à ses citoyens. Près de 50 millions d'Américains n'ont pas d'assurance-santé. Si la réforme devant le Congrès ne prévoit pas une couverture universelle de santé, elle permettra d'étendre la couverture de santé à 95% de la population.

Pour la première fois, la plupart des Américains seraient soumis à l'exigence de se doter d'une couverture, sous peine de se voir infliger des pénalités en cas de refus. Les compagnies d'assurance ne pourraient plus refuser l'octroi d'une couverture en raison d'antécédents médicaux. Le projet prévoit aussi un accroissement du programme Medicaid, qui fournira des soins payés par le gouvernement à des millions de personnes disposant de bas revenus.

Des analystes au Congrès ont évalué le coût de la réforme à 940 milliards de dollars sur une décennie, en combinant les deux textes présentés au Sénat et à la Chambre des représentants.

Si elle est approuvée par le Congrès américain, ce serait l'une des réformes les plus audacieuses adoptées par un président et un Congrès américains. Une couverture de santé nationale s'est en effet révélée un objectif inaccessible pour des générations de présidents américains.

Elle risque encore d'échapper à Barack Obama, des divergences de dernière minute menaçant encore l'adoption du texte, après plus d'une année d'efforts et de débats houleux qui ont profondément divisé le pays. L'attention se portait notamment sur un petit groupe de démocrates qui trouvent que les restrictions sur le financement de l'avortement ne vont pas assez loin. Déterminés à éviter des votes sur un sujet aussi sensible, les responsables démocrates ont soulevé la possibilité d'un ordre exécutif de Barack Obama qui réaffirmerait la loi fédérale interdisant que l'argent du contribuable ne finance des avortements, excepté en cas de viol, d'inceste ou de danger pour la vie de la mère.

La Chambre des Représentants votera dimanche séparément sur le texte adopté par le Sénat le 24 décembre dernier et sur une série de modifications. Le texte adopté par le Sénat sera ensuite soumis à la signature du président tandis que le texte complémentaire viendra devant le Sénat qui espère l'adopter en une semaine dans le cadre d'une procédure dite de réconciliation qui ne requiert qu'une majorité de 50 voix sur 100.