Henry Skinner a moins d'une semaine à vivre. Mercredi prochain, cet Américain de 48 ans doit être exécuté pour un triple meurtre commis en 1993 dans une bourgade du nord du Texas. Or, plusieurs experts, y compris à Montréal, tentent désespérément d'empêcher sa mise à mort. Ils estiment qu'il n'est pas responsable de ce crime.

Une enseignante de l'Université de Montréal fait partie des sceptiques qui se mobilisent. «Tous les éléments dans cette affaire portent à croire que le Texas s'apprête à tuer un innocent», estime Laura Aubert, chargée de cours à l'École de criminologie.

Depuis le mois de janvier, cette sociologue milite activement pour empêcher l'exécution du condamné. En plus de relayer des pétitions internationales dans le réseau universitaire, elle dirige un blogue avec un collègue pour sensibiliser les internautes à cette affaire.

Leur but : créer une mobilisation qui inciterait le gouverneur du Texas à accorder un sursis au condamné. Henry Skinner aurait ainsi le temps nécessaire pour réaliser des tests ADN qui pourraient prouver ce qu'il clame depuis le début : son innocence.

Dans le couloir de la mort depuis 1995, Henry Skinner, surnommé Hank, réclame ces expertises depuis plus de 10 ans. Le Texas les lui a toujours refusés, arguant qu'il avait déjà eu son procès.

Skinner est accusé d'avoir battu à mort sa petite amie le soir du jour de l'An 1993 dans leur domicile de Pampa, au nord du Texas. On lui attribue également le meurtre des deux fils de cette dernière, qui ont été poignardés.

Indices ténus

«Aussi étrange que cela puisse paraître, les armes du crime, un nécessaire à prélèvements vaginaux, les ongles d'une des victimes et une veste d'homme retrouvée sur la scène et tachée de sang n'ont jamais été analysés», déplore Laura Aubert, qui suit le dossier de près.

En fait, aucune preuve matérielle n'a été présentée pendant le procès. Le jury s'est fié au témoignage d'une voisine qui avait accueilli le condamné le soir du drame. Cette dernière avait déclaré que Skinner lui avait avoué ses crimes lorsqu'il s'était présenté chez elle, ivre et les habits tachés de sang.

En 1997, cet unique témoin s'est rétracté, affirmant avoir subi des pressions de la police pour incriminer l'accusé.

«J'ai rarement vu un cas reposer sur des indices aussi ténus, aussi indirects», estime David Protess, professeur de journalisme dont les enquêtes ont mené à la libération d'une dizaine de condamnés à mort. Dans une lettre adressée à la Commission des grâces, M. Protess déplore que la police n'ait «jamais interrogé» l'oncle de la victime. Aujourd'hui mort, cet homme au passé violent l'avait pourtant harcelée par le passé.

Les espoirs de Hank Skinner reposent désormais sur la Commission des grâces, qui a le pouvoir de recommander un sursis au gouvernement du Texas. La Cour suprême pourrait aussi suspendre l'exécution en attendant que les tests soient réalisés.