Cernée par les Républicains, la Maison-Blanche va probablement renoncer à un procès du 11 Septembre devant la justice de droit commun mais des experts estiment que les tribunaux d'exception ne peuvent pas pour autant devenir la règle.

«Une décision n'est pas attendue avant des semaines, le président s'est impliqué parce que le Congrès a pris une part active dans le débat sur la juridiction qui accueillera le procès de Khaled Cheikh Mohammed (KSM)», a affirmé mardi le porte-parole de la Maison-Blanche Robert Gibbs à la presse.

Depuis que les élus de New York ont changé d'avis et refusé d'organiser le procès devant un tribunal de droit commun de KSM et de ses quatre co-accusés pour répondre des attentats du 11 Septembre, l'administration Obama examine d'autres solutions.

Elle ne cachait plus ces derniers jours qu'elle pourrait finalement se plier à la demande du Congrès et organiser ce procès historique devant un tribunal militaire d'exception, comme George W. Bush prévoyait de le faire.

L'influent sénateur républicain Lindsey Graham a récemment mis le marché sur la table: si l'administration accepte de reculer, il aidera à convaincre les parlementaires républicains de cesser leur obstruction systématique depuis un an à la fermeture de Guantanamo.

«En partie parce qu'elle a sous-estimé le problème et en partie parce qu'elle n'a pas organisé le transfèrement des cinq hommes à New York, l'administration a donné à l'opposition tout le temps de se mobiliser», analyse Benjamin Wittes de la Brookings Institution à Washington.

Interrogés par l'AFP, plusieurs anciens responsables de l'administration Bush ont cependant encouragé Barack Obama à ne pas abandonner pour autant le principe des procès de terroristes présumés devant des tribunaux fédéraux.

«L'administration a essayé de mettre en place un système à plusieurs niveaux - un système judiciaire de droit commun, un système militaire d'exception et un système de détention préventive -, tout cela est incohérent si les principales figures d'Al-Qaeda sont jugées devant des tribunaux civils», explique Juan Zarate, ancien membre du conseil de sécurité nationale sous l'administration Bush.

«Certains suspects de terrorisme sont capturés hors des États-Unis, d'autres aux États-Unis, certains sont capturés sur le champ de bataille, d'autres dans des villes: le choix du tribunal le plus adapté dépend du lieu où ils ont été appréhendés et du crime qu'ils ont commis», assure de son côté John Bellinger, ancien conseiller juridique du président Bush, par ailleurs favorable à un procès civil du 11 septembre.

«Il ne serait pas bienvenu de n'utiliser que les tribunaux de droit commun ou que les tribunaux militaires d'exception», ajoute-t-il, convaincu que l'administration imposera la justice traditionnelle, par exemple pour tout suspect arrêté sur le sol américain ou de nationalité américaine.

S'il peut créer une «situation politique embarrassante», le changement de juridiction pour les accusés du 11 septembre accompagné d'un panachage des dossiers entre les deux systèmes judiciaires est néanmoins juridiquement viable, assure David Rivkin, expert au Council of foreign relations de tendance conservatrice.