La centrale électrique alimentée au gaz naturel, dont la construction était presque terminée, devait ajouter au prestige de Middletown, ville de la célèbre Université Wesleyan. Selon ses promoteurs, l'usine allait être citée en exemple au Connecticut et ailleurs aux États-Unis pour sa technologie d'avant-garde et ses 620 mégawatts d'énergie «propre». C'était sans compter sur la malchance.

Une puissante explosion probablement due au gaz a détruit hier matin l'usine Kleen Energy, faisant au moins cinq morts et une vingtaine de blessés, selon les autorités locales. Le bilan pourrait s'alourdir dans les prochaines heures, mais il devrait rester bien inférieur aux 50 morts qui avaient été évoqués plus tôt dans la journée par des secouristes. Ceux-ci continuaient hier soir à fouiller sous les décombres de l'usine pour trouver d'autres victimes. 

L'explosion s'est produite vers 11h20 dans le bâtiment principal de l'usine, au moment où des ouvriers étaient en train de purger des conduites de gaz. Des témoins ont raconté avoir vu une boule de feu, suivie d'une épaisse colonne de fumée noire, s'élever au-dessus du terrain, situé à l'écart de la ville, au bord du fleuve Connecticut.

Des camions de pompiers, des ambulances et des hélicoptères ont rapidement convergé vers la scène du drame. Les pompiers ont mis environ une heure pour maîtriser les flammes, tandis qu'ambulances et hélicoptères ont servi à transporter les blessés vers les différents hôpitaux de la région.

Le nombre exact d'ouvriers qui se trouvaient dans l'usine est inconnu. Ceux-ci travaillent pour divers entrepreneurs et sous-traitants qui ne tiennent pas de registre commun.

«Entre 100 et 200 personnes peuvent travailler tous les jours n'importe où sur les lieux», a déclaré le maire de Middletown, Sebastian Giuliano, lors d'une conférence de presse. Selon lui, l'endroit où se trouvaient les conduites de gaz avait été évacué de la plupart de ses ouvriers.

«Les gens pensaient que c'était une bombe ou un séisme»   

Le maire Giuliano, qui se trouvait à l'église au moment de la déflagration, l'a comparée à un «boum supersonique». Un boum qui a fait voler en éclats des fenêtres et qui a lézardé des murs à Middletown. Un boum qui a été ressenti à plusieurs kilomètres à la ronde.

«Notre maison a été secouée», a raconté Tom Gaffey, qui vit à Meridien, à 16 km de Middletown, et qui représente ces deux villes au Sénat du Connecticut. «Le téléphone s'est aussitôt mis à sonner. Les gens pensaient que c'était une bombe ou un séisme.»

James Florio, dont la maison se trouve à environ trois kilomètres de l'usine, prenait sa douche au moment de l'explosion.

«J'ai eu l'impression qu'une voiture me rentrait dans le derrière. J'ai dû m'accrocher au pommeau de la douche pour ne pas tomber», a-t-il dit.

Bernadette Niland, qui habite à moins d'un kilomètre de la centrale, se trouvait dans la cour arrière de sa résidence au moment de l'explosion. La force de la déflagration était telle qu'une fenêtre de sa maison a volé en éclats.

«Imaginez une grosse explosion, et multipliez par 20», a dit Mme Niland, quand La Presse lui a demandé de décrire ce qu'elle a entendu.

L'usine Kleen Energy, dont la construction a commencé en 2007, devait être mise en service ce printemps ou cet été. La centrale était à 95% terminée. Selon le maire de Middletown, aucun incident ne s'y était produit avant le drame d'hier.

L'explosion d'hier survient quelques mois après une déflagration semblable dans une usine de Caroline-du-Nord qui avait fait 4 morts et 67 blessés. Une agence gouvernementale avait rendu publiques des recommandations la semaine dernière pour assurer la sécurité des ouvriers chargés de purger les conduites de gaz.

La police du Connecticut et diverses agences fédérales enquêteront sur l'explosion de Middletown, dont la cause exacte n'est pas encore connue. Le maire Giuliano a cependant exclu le terrorisme.

L'identité des victimes n'a pas été révélée hier. Des membres de la famille de Raymond Dobratz, 58 ans, ont cependant confirmé sa mort. Père de trois enfants, Dobratz était membre d'un syndicat local de plombiers.

Quant aux blessés, la majorité ont été conduits à l'hôpital Middlesex, à Middletown. Sur les onze patients admis, huit étaient toujours hospitalisés en fin d'après-midi. Ils souffraient notamment de fractures, de blessures abdominales et de divers traumatismes.

«Certains ont fait des chutes d'une dizaine de mètres», a indiqué à La Presse Brian Albert, porte-parole de l'hôpital. Aucun d'entre eux n'a souffert de brûlures et tous étaient hors de danger en soirée.

Trois autres personnes plus sérieusement blessées ont été envoyées à l'hôpital de Hartford, capitale du Connecticut. Avec Catherine Handfield

Photo: AP