Le département d'État américain a annoncé mercredi avoir levé l'interdiction de visa pesant sur le Suisse Tariq Ramadan, l'intellectuel musulman controversé, qui avait été empêché de prendre un poste universitaire aux États-Unis sous l'ère Bush.

Lors d'un point de presse, le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley, a estimé que M. Ramadan ne faisait pas peser de menace sur la sécurité des États-Unis.

Tariq Ramadan, qui enseigne actuellement à l'Université d'Oxford en Grande-Bretagne, devait prendre un poste à l'Université de Notre Dame dans l'Indiana en 2004 lorsqu'il s'était vu refuser un visa, en dépit de dizaines de voyages antérieurs aux États-Unis.

Le département d'État a annoncé une mesure similaire en faveur d'un autre intellectuel musulman, Adam Habib, qui enseigne actuellement en Afrique du Sud, à l'Université de Johannesburg.

«Conformément à la politique de la main tendue du président (Barack) Obama en direction des musulmans du monde entier, nous souhaitons encourager un débat mondial», a observé M. Crowley.

«Nous voulons avoir la possibilité de recevoir des universitaires musulmans pour un dialogue avec d'autres religions et d'autres gens ici même dans notre pays», a-t-il fait valoir.

Dans un communiqué diffusé par l'Union américaine des libertés civiles (ACLU), qui avait combattu son interdiction de visa devant la justice, Tariq Ramadan s'est dit «très content» de la décision de Washington.

«J'espère me rendre bientôt aux Etats-Unis pour pouvoir à nouveau engager un dialogue ouvert, critique et constructif avec des universitaires américains et des intellectuels», a-t-il déclaré.

M. Crowley a expliqué que la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton avait signé en faveur des deux hommes une «exemption» à la loi sur l'immigration et la nationalité. Cela signifie que si ces intellectuels déposent une nouvelle demande de visa, celui-ci ne pourra leur être refusé pour les mêmes motifs que la dernière fois, a indiqué le porte-parole.

Ils devront cependant satisfaire à tous les critères exigés de quiconque demande un visa pour les Etats-Unis, a-t-il ajouté.

L'ACLU s'est félicitée de la décision de Washington, qui survient six mois après un jugement d'une cour d'appel fédérale donnant tort à l'administration dans cette affaire.

La décision du département d'Etat «montre que l'administration Obama s'engage à faciliter l'échange d'idées par-delà les frontières», a estimé l'association de défense des droits de l'homme.

Initialement motivé par une «clause idéologique» de la législation antiterroriste Patriot Act, le refus de visa de M. Ramadan avait ensuite été expliqué par le fait que Ramadan avait donné 1 300 dollars à une organisation caritative suisse, «l'Association de Secours Palestinien» (ASP).

Cette association avait fourni des financements au Hamas, le mouvement islamiste qui contrôle la bande de Gaza, considéré par Washington comme une organisation terroriste.

Le chercheur avait lui même écrit dans sa demande de visa avoir donné ces fonds et n'avait aucune idée des liens de l'ASP avec le Hamas. En outre, cette donation était antérieure à 2003, année où le groupe avait été inscrit sur la liste noire américaine.