L'administration Obama surveille attentivement le Yémen et la Somalie, craignant qu'Al-Qaïda ne s'y renforce en réaction au tour de vis que les États-Unis espèrent imposer à l'organisation en Afghanistan et au Pakistan.

«La lutte contre l'extrémisme violent ne prendra pas fin rapidement, et elle s'étend bien au-delà de l'Afghanistan et du Pakistan», a déclaré le président américain Barack Obama mardi dans son discours pour exposer la nouvelle stratégie américaine dans la région.

M. Obama a annoncé l'envoi de 30 000 soldats américains supplémentaires et insisté sur le partenariat stratégique avec le Pakistan.

«Là où Al-Qaïda et ses alliés tentent de prendre pied, que ce soit en Somalie ou au Yémen ou ailleurs, nous devrons lui faire face par une pression croissante et des partenariats solides», a-t-il ajouté.

M. Obama n'a pas établi de lien direct entre sa stratégie en Afghanistan et au Pakistan, et le fait qu'Al-Qaïda cherche à trouver des refuges sûrs au Yémen et en Somalie, mais son conseiller à la sécurité nationale l'a fait.

«D'après nos meilleures informations, Al-Qaïda se sent de moins en moins à l'aise au Pakistan», a ainsi déclaré le général James Jones mercredi. «Nous avons la preuve qu'ils sont en train de se déplacer, du moins une partie d'entre eux, vers le Yémen et la Somalie».

«Cette organisation recherchera toujours des espaces sans droit où elle a l'impression de pouvoir agir sans être surveillée», a-t-il ajouté.

Or, «ce qui est préoccupant, c'est que si nous réussissons (...) en Afghanistan et au Pakistan, ils finiront par vouloir aller quelque part, et nous devons les suivre à la trace», a-t-il dit à propos des membres d'Al-Qaïda, n'excluant pas une action militaire là où ils trouveront refuge.

Les États-Unis, a-t-il ajouté, travailleront en collaboration avec d'autres gouvernements, dont ceux du Yémen et de l'Arabie Saoudite voisine.

Michael Leiter, directeur du National Counterterrorism Center (NCTC), un organisme gouvernemental américain, avait averti le 30 novembre lors d'une audition au Congrès que le Yémen pourrait devenir pour Al-Qaïda une base d'entraînement et de préparation d'attentats, et que le mouvement islamiste des shebab en Somalie entretenait des liens avec des membres d'Al-Qaïda en Afrique de l'est.

«Nous sommes en train de fournir au gouvernement fédéral transitoire (en Somalie) 40 tonnes d'armes destinées à être utilisées contre les shebab et d'autres» extrémistes, a indiqué à l'AFP un haut responsable du département d'État.

«Plus la situation se détériore en Somalie, plus la probabilité est grande qu'Al-Qaïda y prenne pied», a-t-il ajouté sous couvert d'anonymat.

Ce responsable a en revanche laissé percer une certaine frustration vis-à-vis des autorités du Yémen: «Il est clair qu'elles doivent agir plus, et nous restons disposés à les aider».

Pour les analystes des centres de réflexion Carnegie Endowment for International Peace et Center for New American Security le Yémen est en proie à une instabilité croissante alimentée par un mouvement sécessionniste au sud et une rébellion chiite au nord, auxquels s'ajoutent la crise économique et une pénurie d'eau.

Mais pour Michael O'Hanlon, spécialiste de la sécurité nationale à la Brookings Institution, s'il est fort probable qu'Al-Qaïda essaie de trouver refuge au Yémen et en Somalie, l'organisation risque aussi d'échouer si elle se retrouve empêtrée dans des luttes de pouvoir et se met à dos des acteurs locaux, comme en Irak.