Au lendemain de la tuerie au Texas qu'un militaire d'origine palestinienne est soupçonné d'avoir perpétrée, l'armée américaine craint une réaction violente contre ses soldats musulmans mais aussi que le drame entretienne la psychose d'une armée infiltrée par des islamistes.

Sur 1,4 million d'hommes au total, l'armée américaine compte environ 3.500 musulmans et le commandant Nidal Malik Hasan est l'un d'entre eux.

Jeudi, il a ouvert le feu à l'aide de deux armes de poing à plus de cent reprises, tuant 13 personnes et en blessant 27, avant d'être lui même touché et mis hors d'état de nuire.

Evoquant les «bribes d'informations» relayées par les médias américains, selon lesquels l'homme s'était lancé dans la rédaction de brûlots encensant les attentats-suicide, le chef de l'Etat-major de l'armée de terre américaine a appelé dimanche à rester «prudent».

«Je suis préoccupé. Ces conjectures pourraient provoquer une réaction violente contre certains de nos soldats musulmans», a déclaré sur CNN le général George Casey. «J'ai demandé aux responsables de nos troupes d'être attentifs», a-t-il précisé.

«Ce serait une honte, aussi profonde que l'est cette tragédie, que notre diversité fasse aussi partie des victimes», a-t-il insisté.

Psychiatre de l'armée de terre d'origine palestinienne, le commandant Hasan, 39 ans, recueillait à Fort Hood, la plus grande base militaire américaine du monde, les confessions et les angoisses des militaires avant leur départ et après leur retour des fronts irakiens et afghans.

Il venait d'apprendre son propre déploiement en Afghanistan.

Ses mobiles restent indéterminés, notamment la part qu'a pu jouer le stress lié à son travail, mais les premiers éléments qui émergent sur sa personnalité, largement relayés par les médias américains, décrivent un soldat opposé aux deux guerres menées par les Etats-Unis.

Des commentateurs conservateurs ne se sont pas privés de saisir l'occasion pour agiter la menace d'une «cinquième colonne» infiltrée dans l'armée, alors que celle-ci combat dans des pays musulmans.

Scénario cauchemardesque d'une armée recrutant ses propres ennemis dans un pays sans cesse plus effrayé par l'existence de terroristes «made in USA»: la tuerie pourrait de fait compliquer le travail des recruteurs lorsqu'ils se retrouvent face à des candidats de confession musulmane.

Mais l'armée n'a jusqu'à aujourd'hui pas programmé une modification de ses techniques de recrutement, affirme à l'AFP John Kirby, porte-parole du chef d'Etat-major interarmées, Michael Mullen.

Il n'est prévu «dans l'immédiat de changer aucune des procédures de recrutement ou de promotion», a-t-il assuré. «Il y a beaucoup plus de choses que nous ne savons pas sur ce qui a incité cet homme à agir, que de choses que nous savons», a-t-il prévenu.

Ancien combattant du Vietnam devenu coordinateur au Center of Conscious and War, qui défend les droits des objecteurs de conscience, Bill Galvin confirme que des musulmans servent «depuis longtemps» dans l'armée américaine.

Mais pour lui, ils ne sont pas plus susceptibles de demander à ne pas être déployés dans des pays musulmans que de vouloir au contraire y combattre, par patriotisme.

Son organisation, a-t-il précisé, a récemment eu connaissance d'au moins six militaires musulmans qui souhaitaient devenir objecteurs de conscience et quitter l'armée.