Maher Arar ne pourra poursuivre le gouvernement des États-Unis relativement à son arrestation à l'aéroport John-F.-Kennedy, à New York, en 2002.

Une cour d'appel fédérale américaine a maintenu, lundi, à sept voix contre quatre, la décision d'un tribunal inférieur qui rejetait la poursuite intentée par M. Arar.

L'ingénieur canadien avait intenté une poursuite contre Washington et des hauts dirigeants du département de la Justice, en faisant valoir qu'il avait été intentionnellement extradé vers la Syrie après son arrestation à New York, en vertu d'informations canadiennes erronées l'accusant de liens avec des islamistes extrémistes.

La poursuite prétendait que M. Arar n'avait eu accès à un avocat qu'après plusieurs demandes.

La Syrie nie qu'il ait été torturé. Le Canada a toutefois accepté de lui verser un dédommagement de 10 millions $, après avoir reconnu avoir transmis de fausses informations aux autorités américaines.

Le tribunal américain a estimé qu'il ne peut permettre à M. Arar d'utiliser le système judiciaire pour obtenir compensation des États-Unis, sans que le Congrès américain n'ait tout d'abord adopté une loi encadrant de telles demandes extraordinaires.

Autrement, a ajouté le tribunal, l'octroi du feu vert à une telle poursuite irait à l'encontre du principe de séparation des pouvoirs et nuirait à la politique étrangère des États-Unis.

L'avocate de M. Arar, Maria LaHood, du Center for Constitutional Rights, a indiqué qu'elle portera vraisemblablement la cause devant la Cour suprême des États-Unis. «Je ne peux envisager de laisser aller cette décision sans la contester. C'est une insulte», a-t-elle lancé.

Dans un communiqué émis par l'organisme, M. Arar affirme que cette décision et d'autres démontrent que «le système judiciaire américain est devenu ni plus ni moins qu'un outil que la Maison-Blanche peut manipuler aisément par le biais d'allégations sans fondement et de rumeurs».

Une porte-parole du gouvernement n'a pas voulu immédiatement commenter.

Le tribunal devait se prononcer sur la pratique des «extraditions exceptionnelles», qui voient un individu soupçonné de terrorisme être transféré vers un pays étranger pour y être incarcéré et interrogé, sans accusations, sans procès ou sans accord d'un tribunal.

La cour d'appel a expliqué qu'elle hésitait à créer un «nouveau système de dédommagement que le Congrès n'a pas encore jugé bon d'autoriser».

Se prononçant au nom des magistrats dissidents, le juge Barrington D. Parker a contesté l'argument voulant que la poursuite de M. Arar ait pu porter atteinte à la diplomatie, à la politique étrangère et à la sécurité des États-Unis.

Une telle interprétation de la séparation des pouvoirs, a-t-il dit, relègue les tribunaux aux lignes de côté, en plus d'amenuiser et de déformer le rôle de l'appareil judiciaire, surtout en période trouble.

Il ajoute que cette interprétation banalise le rôle de l'appareil judiciaire.