Les États-Unis ont connu le clan Bush et le couple Clinton, mais rien de comparable au mélange de pouvoir, de glamour et de tragédie qu'incarne la famille Kennedy, une dynastie politique désormais privée de son patriarche, Edward, mort mercredi à 77 ans.

Même dans un pays habitué à la transmission familiale de mandats électifs, les Kennedy sont un cas à part et forment la plus emblématique famille politique des États-Unis. La mort du très charismatique «Ted» la laisse sans héritier manifeste pour reprendre le flambeau. La tumeur au cerveau diagnostiquée après l'attaque dont a été victime Ted Kennedy en mai 2008 a été un choc pour les Américains, mais aussi un révélateur de l'aura des Kennedy dans la vie politique du pays.

Ted Kennedy était le plus jeune des neuf enfants de Joseph et Rose Kennedy, le couple fondateur d'un clan enrichi dans la banque qui allait marquer l'histoire américaine du XXe siècle du double sceau de la réussite et de la tragédie.

Des quatre fringants garçons de la famille, Joseph, l'aîné, meurt dans un accident d'avion pendant la Seconde Guerre mondiale.

Quelques années plus tard, leur soeur Kathleen périt à son tour en France dans un accident d'avion. Une autre soeur, Rosemary, souffrant d'un léger retard mental, subit à l'âge de 23 ans une lobotomie qui la laisse profondément handicapée.

Les assassinats du président John F. Kennedy et de son jeune frère Robert («Bobby»), allaient ensuite jeter une ombre sur l'optimisme des années 60. Le président est abattu à Dallas (sud) le 22 novembre 1963, un assassinat qui continue 45 ans plus tard à traumatiser les Américains.

Cinq ans plus tard, Bobby, son ancien ministre de la Justice et candidat à la candidature démocrate à la présidentielle de 1968, est à son tour tué par balles par un militant palestinien.

Les deux frères sont enterrés à proximité l'un de l'autre au cimetière national d'Arlington, près de Washington.

C'est à Ted qu'est revenue la tâche de reprendre le flambeau.

«À un certain moment, quand Bobby est mort, il a porté non seulement le flambeau familial, mais aussi la famille elle-même», souligne l'historienne Doris Kearns Goodwin.

Mais tant l'histoire de sa famille que la sienne propre sont aussi ternies par le scandale et la tragédie. Avant que l'âge ne le rattrape, il traînait une réputation de coureur porté sur la bouteille et avait connu un divorce houleux avec sa première femme, Joan Bennett Kennedy.

Des questions n'ont jamais cessé d'entourer l'accident de Chappaquiddick en 1969. Ted Kennedy, dont la passagère meurt noyée après la chute de leur voiture dans une rivière, écope de deux mois de prison pour délit de fuite, une peine qui sera suspendue.

En 1984, son neveu David, fils de Robert, meurt d'une overdose. En 1991, un autre neveu, William Kennedy Smith, est acquitté après un procès pour viol. En 1999, le fils de John, qui a conservé son surnom de John-John, meurt avec sa femme Carolyn lorsque le petit avion qu'il pilotait s'abîme dans l'océan Atlantique, près de la maison familiale du Massachusetts (nord-est).

Après la mort de Ted, ne reste plus guère que son fils Patrick, membre de la Chambre des représentants, pour perpétuer la tradition politique de la famille, après la tentative malheureuse de Caroline, la fille de John, de reprendre le siège de sénatrice de Hillary Clinton en janvier dernier lorsque celle-ci est devenue secrétaire d'État.

Le clan compte cependant d'autres personnalités, comme Maria Shriver, nièce de Ted et épouse du gouverneur républicain de Californie, Arnold Schwarzenegger, et Robert Kennedy Junior, fils de Bobby, l'une des figures de la lutte pour l'environnement.