Les États-Unis commenceront vendredi à se retirer de la base antidrogue de Manta en Équateur, après le refus de ce pays de renouveler leur concession.

La base de Manta, située sur le Pacifique à quelque 280 km au sud-ouest de Quito, permettait depuis dix ans à Washington de mener des opérations de surveillance aérienne de cet océan par où transite une grande partie de la cocaïne acheminée vers les États-Unis. Mais le président socialiste équatorien Rafael Correa n'a eu de cesse de critiquer la présence de ces troupes étrangères sur son territoire.

Un peu plus d'un an après son arrivée au pouvoir en janvier 2007, il avait annoncé, en juillet 2008, sa décision de ne pas renouveler la concession accordée en 1999, pour dix ans, à Washington.

En septembre 2008, il avait aussi fait adopter une Constitution interdisant formellement l'installation de bases étrangères en Équateur.

Pour les Américains, la base de Manta, idéalement située et complétant leurs deux postes avancés d'opérations antidrogue du Salvador et de Curazao, était stratégique. De là décollaient huit avions de surveillance, pour survoler une vaste zone de 6.400 km entre le Pérou et l'Amérique centrale. Selon l'ambassade des États-Unis, la base de Manta et ses deux jumelles auraient ainsi permis, jusqu'en octobre 2008, la prise de plus de 1.600 tonnes de drogue.

Le dernier vol doit avoir lieu vendredi et la fermeture définitive du poste est prévue pour le 18 septembre, selon le ministère équatorien des Affaires étrangères. «Il n'y aura plus d'opérations et les seuls vols qui auront lieu auront pour but de retirer les équipements. Le personnel pliera bagage», a déclaré à l'AFP la porte-parole de l'ambassade des États-Unis à Quito, Marta Youth.

Renforts en Colombie

Afin de compenser cette perte, Washington a cependant obtenu l'accord de Bogota pour mener des opérations aériennes à partir d'au moins trois bases de l'armée colombienne, à Barranquilla, Palanquero et Apiay, a annoncé mercredi le ministre de la Défense colombien par intérim, le général Freddy Padilla de Leon.

La date de démarrage de ces opérations n'a pas été annoncée, mais le général a précisé que la Colombie avait «autorisé la présence de jusqu'à 800 militaires et 600 civils sous contrat», pour mener ces opérations, soit plus que sur le poste avancé de Manta, où un maximum de 450 Américains étaient déployés.

Les États-Unis renforcent ainsi leur présence dans un pays stratégiquement situé, partageant des frontières avec l'Equateur et le Venezuela, souvent critiques de Washington. L'acceptation de la Colombie, qui a reçu des États-Unis depuis neuf ans près de 5,5 milliards de dollars pour l'aider à lutter contre le trafic de drogue, a été annoncée lors d'une audience publique à laquelle participait également le chef de la diplomatie Jaime Bermudez. Ce dernier a longuement insisté sur la «souveraineté» préservée de son pays, en assurant que les bases resteraient sous commandement colombien.

Bogota, qui a perdu un allié clef à Washington avec le départ en janvier du président républicain George W. Bush, reçoit 550 millions de dollars annuels des États-Unis au titre du Plan Colombie de lutte contre la drogue et les guérillas et tente depuis deux ans d'obtenir la ratification par le Congrès américain d'un traité de libre-échange.

Les démocrates sont toutefois réservés sur celui-ci, notamment en raison des importantes violations de droits de l'Homme qu'ils dénoncent dans ce pays.