Le président Barack Obama a affirmé jeudi dans un grand discours sa détermination à fermer le camp de Guantanamo et défendu l'idée de transférer certains détenus dans des prisons américaines, malgré la vive controverse que suscite cette perspective.

M. Obama a tenté d'apaiser les inquiétudes soulevées par sa décision de fermer Guantanamo d'ici à janvier 2010.

Mais il a aussi fait front sur les grands principes face aux attaques de sa droite comme de sa gauche contre sa politique de sécurité nationale, en rupture avec celle de son prédécesseur George W. Bush.

Il n'est pas sûr que ses propos aient fait taire une polémique qui menace de couvrir le message présidentiel de relance économique et de réforme sociale. La possibilité d'un transfert des détenus de Guantanamo dans des prisons américaines est précisément l'une des angoisses du Congrès. Et à droite, l'ancien vice-président Dick Cheney laissait entendre que l'actuel président compromettait la sécurité des Américains.

M. Obama s'est efforcé de tracer une voie médiane entre deux positions «absolutistes», l'une primant la sécurité, l'autre la défense des libertés.

«Je suis convaincu, dans chaque fibre de mon être, que, sur la durée, nous ne pouvons protéger ce pays si nous ne nous adjoignons pas la puissance de nos valeurs les plus fondamentales», a-t-il dit.

Or le camp de Guantanamo, à Cuba, «a entamé l'autorité morale qui est la devise la plus forte des États-Unis dans le monde», et son existence «a probablement créé plus de terroristes dans le monde qu'il n'en a jamais détenu», a-t-il dit, se livrant à une vigoureuse dénonciation des politiques du précédent gouvernement qui, trop souvent, «a accommodé les faits et les preuves pour les faire concorder avec des prédispositions idéologiques».

«Nous sommes en train de nettoyer ce qui est tout simplement un beau bazar», a-t-il déclaré.

M. Obama avait choisi le lieu symbolique des Archives nationales, où sont gardées la Déclaration d'indépendance et la Constitution des États-Unis, pour défendre sa jeune présidence contre les querelles.

Les controverses culminent avec le refus de ses amis démocrates au Congrès, alliés pour l'occasion à leurs adversaires républicains, de lui accorder les 80 millions de dollars qu'il a demandés pour mener à bien la fermeture de Guantanamo. Ils sont favorables à cette fermeture mais craignent que des suspects de terrorisme se retrouvent sur le sol américain et veulent savoir précisément ce que M. Obama compte faire des 240 détenus avant de lui accorder les fonds demandés.

M. Obama a rappelé ses intentions: relâcher les prisonniers dont la justice aura ordonné la libération; faire juger le plus grand nombre possible des autres par des tribunaux civils ou, si ce n'est pas possible, par des tribunaux militaires, avec des garanties pour les suspects; transférer ceux qui restent vers des pays tiers.

«Nous n'allons relâcher personne à l'intérieur des États-Unis qui puissent mettre en danger les Américains», a-t-il assuré. Mais il a défendu l'idée de recourir aux prisons de haute sécurité américaines.

«Gardez ceci à l'esprit: personne ne s'est jamais échappé de l'une des nos prisons fédérales (dites) Supermax, dans lesquelles sont enfermés des centaines de terroristes», a-t-il dit.

Il a reconnu qu'il existait une cinquième catégorie de prisonniers: ceux qu'il se révélerait impossible de libérer, de juger ou de transférer à l'étranger et qui continueraient à représenter une menace.

Il a laissé ouverte pour eux la possibilité d'une détention indéfinie qui risque fort d'indigner les organisations de défense des libertés.

«Je pense qu'après réflexion le président conclura que faire venir les pires des terroristes à l'intérieur des États-Unis causerait un grand danger», a dit M. Cheney.