Si l'administration Obama a ordonné la fermeture de la prison de Guantanamo d'ici à janvier 2010, elle ne renoncerait pas aux tribunaux militaires d'exception, mis en place par son prédécesseur pour juger les 241 terroristes présumés encore détenus à Cuba, selon deux membres anonymes de l'administration samedi.

Lors de son entrée en fonction, le président américain avait suspendu ces tribunaux et toutes les procédures judiciaires pendant 120 jours, jusqu'au 20 mai. Barack Obama pourrait demander une prorogation de 3 mois, a rapporté samedi le quotidien «New York Times», le temps de réorganiser et de redémarrer ces tribunaux décidés par George W. Bush. Barack Obama pourrait profiter de ce délai pour demander au Congrès de modifier les statuts des tribunaux militaires actuels afin de garantir les droits juridiques des détenus. Parmi les nouvelles mesures prises au sein de ces tribunaux, il pourrait être envisagé de ne pas considérer les preuves classées secret défense.

A une question posée au Sénat sur l'abandon du système judiciaire en place à Guantanamo, le secrétaire américain à la Défense avait répondu jeudi: «Pas du tout». Robert Gates avait alors ajouté: ôôLes commissions militaires restent une option».

Le ministre américain de la Justice Eric Holder est allé plus loin, lors d'une audition à la Chambre des représentants, affirmant que les commissions militaires pourraient encore être utilisées mais qu'elles «seraient différentes de celles en place précédemment».

Ce passage devant un tribunal militaire concerne les deux tiers des détenus, le dernier tiers devant, soit être libéré, soit extradé pour être jugé dans un autre pays que les Etats-Unis.

L'idée de reconduire ces commissions a soulevé samedi un tollé parmi les organisations de défense des Droits de l'homme et des libertés civiles. «Relancer un système fatal et mauvais, spécifiquement conçu pour échapper à une procédure régulière et à la primauté du droit, serait une grave erreur et un énorme pas en arrière», s'est insurgé Jameel Jaffer, avocat au Syndicat des libertés civiles américaines.

«Lorsque vous devenez président et que vous voyez toute la panoplie des problèmes auxquels vous devez faire face, certaines des choses qui semblaient faciles à promettre ou à dire pendant la campagne paraissent parfois plus difficiles à réaliser», a expliqué Paul Rothstein, professeur d'Ethique du Droit à l'Université de Georgetown. Mais «nous voulons un président qui réagit à ce qu'il voit quand il est réellement là, plutôt que quelqu'un qui s'accroche à ce qu'il a dit auparavant».