Deux Rapporteurs spéciaux de l'ONU ont annoncé mardi à Genève qu'ils allaient réaliser une étude sur les prisons secrètes utilisées notamment par la CIA dans le cadre de la «lutte contre le terrorisme».

«Nous appelons tous les gouvernements à coopérer, non seulement pour clarifier les faits, mais pour que des centres de détention secrets ne soient plus utilisés à l'avenir», a déclaré le Rapporteur de l'ONU sur la torture Manfred Nowak, qui dirigera l'enquête avec son homologue Martin Scheinin, chargé de veiller au respect des droits de l'homme dans le cadre de la lutte antiterroriste.

M. Nowak a parlé de «l'une des pratiques les plus horribles» de l'après-11 septembre en évoquant l'utilisation de prisons secrètes et a espéré qu'elle «allait prendre fin, et était peut-être en train prendre fin».

Pour les deux Rapporteurs, des experts indépendants nommés par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU, les premiers signaux en provenance du nouveau gouvernement américain, comme l'annonce par le président Barack Obama de la fermeture de la prison de Guantanamo, «font espérer que ce changement est réel».

De même, M. Nowak a affirmé qu'«à titre personnel», il estimait qu'il n'y avait plus de centres de détention secrets dans les pays d'Europe suspectés d'en avoir abrité, comme la Pologne et la Roumanie.

Il est toutefois «trop tôt» pour dire si ces centres secrets ont effectivement disparu, ont prévenu les deux Rapporteurs. «C'est ce que l'étude devra éclaircir», a insisté M. Nowak.

L'étude ne s'arrête pas au seul cas des prisons secrètes de la CIA et porte sur de très nombreux pays. M. Scheinin relève par exemple que des milliers de personnes ont disparu au Pakistan ou au Sri Lanka.

Les conclusions de l'étude devraient être présentées d'ici à un an.

A propos de la Pologne, l'expert onusien s'est déclaré «très encouragé» par le fait que les autorités de Varsovie aient finalement entrepris une enquête officielle, après avoir nié que leur pays abritait de tels centres secrets.

Outre les centres situés dans des pays européens, les deux responsables de l'étude entendent également s'enquérir du rôle joué par les dizaines de bases militaires américaines dans le monde, soupçonnées d'abriter des centres de détention secrets.

M. Nowak a notamment cité le cas de la base de Tuzla en Bosnie-Herzégovine, soupçonnée d'avoir servi à la détention de courte durée d'individus avant leur transfert à Guantanamo.

De son côté, M. Scheinin a dénoncé le fait que la détention dans des lieux secrets avait essentiellement pour but d'obtenir des informations destinées aux services de renseignement, et non d'instruire un dossier en vue d'une inculpation.

Lorsque la nouvelle administration américaine a voulu passer en revue les dossiers des détenus pour déterminer lesquels pouvaient être relâchés, elle n'a trouvé aucun dossier, a-t-il relevé.