Son ton était «celui d'un homme qui parle à des enfants de quatrième année». Il avait «l'air amateur», et sa façon de s'exprimer était «simpliste, voire enfantine». Bref, «c'est un désastre pour le Parti républicain».

Ce sont là quelques-unes des réactions au discours de Bobby Jindal, gouverneur de la Louisiane, qui donnait la réplique après l'allocution du président Barack Obama, mardi soir. Et ces réactions ont été émises par des conservateurs. Sur Fox News. La chaîne la plus proche des républicains.

 

Considéré comme une étoile montante au sein de son parti, Jindal n'a ébloui personne. Mal à l'aise à la télé, la voix nerveuse et sautillante, le jeune gouverneur indo-américain de 37 ans, que certains voient déjà remplacer Obama, est pratiquement assuré d'être parodié, samedi, à Saturday Night Live.

Or, sa mauvaise performance risque d'être rapidement oubliée. Ce qui reste, toutefois, c'est un profond malaise chez les républicains, une organisation en quête d'idées et d'un chef charismatique pour les communiquer.

Après une dure défaite aux dernières élections, les républicains tentent de redéfinir leur parti. Une tâche difficile: le mantra conservateur voulant que l'entreprise privée ait réponse à tout ne trouve pas beaucoup de preneurs à une époque où les plus grandes banques et les compagnies d'assurances tombent comme des mouches - et menacent d'emporter le pays avec elles.

Aujourd'hui, le Parti républicain vit le même dilemme que le Parti démocrate au lendemain des attaques du 11 septembre. Le pays est en crise. Les gens sont à bout de nerfs. Le président doit agir. L'opposition a le choix: travailler de concert avec le commandant en chef, ou se placer en travers de la route.

Pour l'heure, les républicains ont décidé de tenir tête à Obama. Confronté à une crise économique provoquée par le manque de règles et le capitalisme débridé, le parti penche de plus en plus vers la droite.

Les républicains ne semblent pas réaliser l'ironie de leur position. Mardi soir, Bobby Jindal a martelé que l'entreprise privée était la mieux placée pour répondre aux besoins de la population, même en temps de crise.

Incohérence intellectuelle

«Nous, en Louisiane, après l'ouragan Katrina, nous savons ce qui arrive quand on décide de se fier au gouvernement fédéral», a-t-il risqué, sur un ton complice.

Une déclaration qui a fait sortir de ses gonds le chroniqueur Paul Krugman, du New York Times, selon qui le gouverneur républicain tente d'utiliser les ratés de son propre parti pour prouver par A " B que le gouvernement fédéral ne peut rien faire de bon.

«Est-ce qu'il pense vraiment que la réponse appropriée à Katrina est de laisser cela entre les mains d'actions privées non coordonnées? a dit Krugman. Hé, pourquoi avoir une armée, alors? Pourquoi ne pas simplement armer les citoyens? L'incohérence intellectuelle de cette position est tout simplement ahurissante.»

Certains républicains qui se présentent comme étant les plus radicaux du parti ont même promis de refuser l'argent du plan de relance de 787 milliards US signé par Obama.

C'est le cas de M. Jindal, qui a récemment pris la parole à l'émission Meet the Press pour affirmer qu'il entendait refuser 100 millions US en subventions pour l'assurance chômage en Louisiane.

«Washington ne devrait pas endetter les citoyens davantage pour remettre le pays sur les rails. Nous avons des différences fondamentales avec l'administration Obama sur la façon de régler les problèmes», a-t-il dit.

Loin des caméras, Bobby Jindal s'est montré moins radical: il a accepté 3,7 des 3,8 milliards alloués à la Louisiane par la Maison-Blanche. La résistance a ses limites.

 

Nouveau secrétaire au Commerce

Le président Obama a nommé, hier, un ancien gouverneur d'origine chinoise, Gary Locke, pour le poste de secrétaire au Commerce, une troisième tentative pour attribuer ce poste-clé en période de récession.

M. Locke a été gouverneur de l'État de Washington de 1997 à 2005.

Début décembre, M. Obama avait désigné à ce poste le démocrate d'origine hispanique Bill Richardson. Mais celui-ci avait dû renoncer un mois plus tard la nomination, citant une enquête pour trafic d'influence. En février, le sénateur républicain Judd Gregg, nommé par Obama, a renoncé au poste en raison de divergences avec la Maison-Blanche sur de nombreuses questions, dont le plan de relance de l'économie de 787 milliards de dollars promulgué la semaine dernière.