La seule femme à siéger actuellement à la Cour suprême des Etats-Unis Ruth Bader Ginsburg a été opérée jeudi d'un cancer du pancréas qui pourrait l'empêcher de poursuivre ses activités et entraîner la nomination à vie d'un nouveau juge, un choix crucial pour Barack Obama.

Ruth Bader Ginsburg, nommée en 1993 par Bill Clinton, a été opérée jeudi d'un «cancer du pancréas à un stade précoce» au Memorial Sloan-Kettering Cancer Center à New York, a assuré la plus haute juridiction des Etats-Unis dans un communiqué.

Citant le docteur Murray Brennan, elle a précisé qu'elle devrait «rester à l'hôpital entre 7 et 10 jours».

Si la tumeur, de petite taille, a été décelée lors d'une visite médicale de routine et sans que Mme Ginsburg n'ait ressenti aucun symptôme préalable, le cancer du pancréas est une des formes les plus graves de la maladie. Un patient sur dix en moyenne survit cinq ans après le diagnostic.

La deuxième plus âgée après le juge John Paul Stevens, 88 ans, Mme Ginsburg avait fait savoir cette année à plusieurs reprises qu'elle n'avait pas l'intention de quitter ses fonctions à la Cour suprême de sitôt.

Mais cette petite femme menue et d'apparence très frêle, malgré les grandes lunettes qui ont fait sa réputation, a déjà souffert d'un cancer du colon en 1999.

Le rythme soutenu imprimé à la Cour par son nouveau président John Roberts, nommé en 2005, pourrait devenir éprouvant pour elle.

Les juges de la Cour suprême sont nommés à vie mais peuvent démissionner pour des raisons personnelles.

Si Ruth Bader Ginsburg prenait cette décision, le président Barack Obama devrait nommer un ou une remplaçante, un décision cruciale.

Gardienne de la Constitution, la Cour suprême est souveraine aux Etats-Unis sur toutes les questions de société mais aussi économiques, environnementales, religieuses, etc.. Elle a à titre d'exemple autorisé la pratique médicalisée de l'avortement en 1973 ou le rétablissement de la peine de mort en 1976.

Pendant les huit dernières années, elle a à plusieurs reprises infligé des revers à l'administration Bush, bien obligée néanmoins de se ranger derrière ses décisions.

Dans ce contexte, M. Obama, ancien professeur de droit constitutionnel, a plusieurs fois pendant la campagne présidentielle exprimé le souhait de nommer un juge qui ait «du coeur, de l'empathie» pour les personnes vulnérables, à l'image de Mme Ginsburg, inlassable combattante pour les droits civiques, des femmes notamment.

Pour la presse américaine et les blogs spécialisés en outre, le futur nominé sera à coup sûr une femme, alors que George W. Bush avait déçu en remplaçant Sandra O' Connor, nommée par Ronald Reagan en 1981, par un homme d'origine italienne, Samuel Alito.

Helen Kagan, doyenne de la faculté de droit de Harvard, nommée au poste très sensible d'avocate du gouvernement Obama (sollicitor general), fait figure de favorite. Mais d'autres noms circulent parmi lesquels Sonia Sotomayor, une juge de la Cour d'appel de New York, qui deviendrait ainsi la première juge à la Cour suprême d'origine hispanique.

Quoiqu'il en soit, selon Cass Sustein, professeur à Harvard, la formation intellectuelle de M. Obama est «une garantie pour nous de voir nommé quelqu'un d'intellectuellement très solide».

La sensibilité politique d'un nouveau juge ne changera en outre pas l'équilibre actuel de la Cour, puisque Mme Ginsburg appartient au camp des quatre juges ayant des positions progressistes, face à quatre juges plus conservateurs et du juge Antony Kennedy, qui vote tantôt avec les uns, tantôt avec les autres.