Le président américain Barack Obama a ordonné jeudi la fermeture d'ici un an du camp de Guantanamo, affirmant par là de la manière la plus symbolique qui soit sa volonté de rompre avec les politiques controversées de son prédécesseur George W. Bush.

Au cours de la même cérémonie dans le Bureau ovale de la Maison-Blanche, M. Obama a aussi signé un autre décret stipulant que les États-Unis se conformeront dans le traitement des prisonniers aux Conventions de Genève, conventions dont l'administration Bush contestait qu'elles s'appliquaient aux suspects de terrorisme, et au manuel de l'armée de terre.

C'est une autre remise en cause spectaculaire des pratiques de la «guerre mondiale contre le terrorisme» menée par l'administration Bush, et un désaveu des techniques d'interrogatoire employées par la CIA, dénoncées par beaucoup comme des actes de torture.

Les Américains savent «que nous ne perpétuerons pas le mauvais choix entre notre sécurité et nos idéaux», a dit M. Obama dans une vigoureuse dénonciation des pratiques approuvées par M. Bush.

«Ce que je fais ici, ce n'est pas seulement tenir l'engagement que j'ai pris pendant la campagne électorale, c'est, je crois, une conception qui remonte aux pères fondateurs (des États-Unis) selon laquelle nous entendons respecter les normes fondamentales de comportement, pas seulement quand cela est facile, mais aussi quand c'est dur», a-t-il dit lors de la cérémonie de signature en présence de militaires à la retraite dans le Bureau ovale.

En signant le décret engageant «un processus en vertu duquel Guantanamo sera fermé dans un an au plus tard», M. Obama a en effet non seulement tenu l'une de ses grandes promesses, mais aussi répondu aux instances pressantes d'alliés aussi sûrs dans la lutte antiterroriste que la Grande-Bretagne.

Avec ces décrets et deux autres signés par la même occasion par M. Obama, «le message que nous envoyons au monde, c'est que les États-Unis ont l'intention de poursuivre le combat engagé contre la violence et le terrorisme, que nous le ferons avec vigilance, que nous le ferons avec efficacité, et que nous le ferons dans le respect de nos valeurs et de nos idéaux», a-t-il dit.

Guantanamo, ouvert après les attentats du 11 septembre 2001 pour détenir des hommes classés comme des «combattants illégaux», est devenu l'un des symboles les plus parlants des pratiques controversées employées par l'administration Bush dans la lutte contre le terrorisme.

Les organisations de défense des droits de l'homme ont dénoncé Guantanamo comme une zone de non-droit, où des prisonniers sont détenus pendant des années sans mise en cause formelle. Elles se sont émues de leurs conditions de détention et des tortures dont certains auraient été victimes, selon elles.

Un défenseur aussi ardent de Guantanamo que l'ancien vice-président conservateur Dick Cheney affirmait que Guantanamo était une installation «de première classe» nécessaire pour détenir des individus qui ne relevaient pas du droit américain.

M. Bush assurait que les États-Unis ne pratiquaient pas la torture. Lui-même et son administration affirmaient leur volonté de fermer Guantanamo mais avaient prévenu l'équipe Obama que la loi et la sécurité des États-Unis faisaient de cette fermeture une affaire très compliquée.

En se laissant un an, M. Obama se donne le temps de répondre à l'épineuse question: que faire de prisonniers qui peuvent encore être dangereux et dont pas grand monde ne voudra?

Pour beaucoup, dont le président Obama, Guantanamo est l'une des causes de la détérioration de l'image des États-Unis à l'étranger.

Jeudi, la volonté de rupture de M. Obama devait aussi se manifester au département d'État où il se rendra pour rencontrer sa secrétaire d'État Hillary Clinton. Il pourrait à cette occasion annoncer avoir choisi George Mitchell, artisan de la paix en Irlande du Nord, comme émissaire au Proche-Orient.

Selon le Washington Post, M. Obama devrait aussi annoncer le choix de l'ancien ambassadeur auprès des Nations unies Richard Holbrooke comme envoyé pour l'Afghanistan et le Pakistan.