L'entrée en fonctions de Barack Obama devrait faire de l'ombre à Nicolas Sarkozy, super-actif à l'international et que certains espèrent ainsi voir «remis à sa place», mais le président français n'entend pas être relégué au rang de chef d'une puissance intermédiaire.

Le président français a ainsi assuré quelques heures avant l'entrée en fonctions du premier président noir des Etats-Unis avoir «hâte qu'il se mette au travail et qu'on change le monde avec lui».

Profitant de la présidence tournante de l'UE, qu'il a exercée au second semestre 2008 et de la fin du mandat de George W. Bush, le chef de l'Etat français s'est multiplié sur la scène diplomatique. En Russie et en Géorgie durant l'été, puis dans la gestion de la crise financière à l'automne, et enfin tout récemment lors de deux déplacements au Proche-Orient, en pleine de guerre de Gaza.

Dimanche, après s'être rendu au Caire et à Jérusalem, M. Sarkozy soulignait: «Bien sûr qu'on aura besoin des Etats-Unis d'Amérique, personne n'a l'idée de les exclure». Tout en assurant que l'Europe allait continuer à prendre des initiatives, aiguillonnée par Paris, assure l'Elysée.

Même son de cloche au ministère des Affaires étrangères, où Bernard Kouchner soulignait mardi que «la France et l'Europe vont continuer de jouer leur rôle».

Quand à une possible rivalité de personnes, une source à l'Elysée l'écarte: «On préfère faire avec lui (Obama), il y a de la place pour deux personnes».

La possibilité que l'étoile de Nicolas Sarkozy pâlisse avec la prise de fonctions de Barack Obama a suscité les commentaires acerbes de l'opposition en France.

Pour le député socialiste Pierre Moscovici, le président français va «être remis un peu à sa place». «Non Nicolas Sarkozy n'est pas le maître du monde, non Nicolas Sarkozy n'est pas le roi de l'Europe, non Nicolas Sarkozy n'est pas un monarque français pour l'éternité», a-t-il raillé.

«Je pense que Barack Obama sera non pas un concurrent mais un bon antidote à ce que le sarkozysme peut avoir de périlleux, y compris pour la politique internationale», a résumé l'ancien ministre des Affaires européennes.

Selon Philippe Braud, politologue à Sciences Po Paris, l'arrivée de M. Obama «risque de faire beaucoup d'ombre à Nicolas Sarkozy, ne serait-ce qu'en raison de la focalisation des médias, car le poids de son pays est évidemment sans commune mesure avec celui de la France».

En outre, le politologue relève «l'exceptionnelle séduction personnelle» du nouveau président américain, qui «incarne un changement formidable dans l'image que le monde se fait des Etats-Unis», ainsi que son éloquence, qui va concurrencer le «verbe franc et direct» de Nicolas Sarkozy.

Enfin, M. Braud anticipe un «choc spectaculaire des styles» entre un Sarkozy «actif, sinon activiste» et un Obama «posé et soigneusement réfléchi». «Le contraste risque d'être permanent entre l'impulsivité de l'un et la force tranquille de l'autre», juge-t-il.

Sur le fond, la France a fait savoir qu'elle attendait de Barack Obama qu'il s'engage «à fond dans la rénovation de la gouvernance mondiale», a déclaré le Premier ministre français François Fillon.

Le Premier ministre français espère aussi que Barack Obama «reconnaîtra l'échec de l'unilatéralisme» qui «doit céder la place au multilatéralisme» et qu'il participe à résoudre les grandes crises internationales «dans le respect des positions» de l'Europe, en particulier pour le conflit israélo-palestinien.