George W. Bush a utilisé lundi ses dernières heures de président non pour gracier d'anciens politiciens condamnés, mais pour écourter les peines de prison de garde-frontières érigés par leurs partisans en victimes des incohérences de la politique américaine d'immigration.

M. Bush aura aussi consacré une grande partie de sa dernière journée complète de président à faire ses adieux par téléphone à une foule de dirigeants étrangers.

Si les commutations de peines prononcées lundi sont bien les ultimes de M. Bush comme l'a dit son administration, le 43e président aura tenu parole et se sera gardé, à la différence de son prédécesseur Bill Clinton, de susciter une controverse de dernière minute qui entacherait la prise de fonctions de son successeur Barack Obama.

M. Bush, accusé par ses détracteurs d'avoir divisé l'opinion, aurait pu par exemple se servir de son droit de grâce au profit de l'ancien bras droit du vice-président Dick Cheney, Lewis «Scooter» Libby, condamné en 2007 dans une affaire touchant à la justification de la guerre en Irak.

Mais, après la commutation des peines de deux garde-frontières et avant mardi 12h00 locales quand M. Obama prêtera serment, «on ne s'attend à aucune autre annonce» de mesure d'indulgence, a dit un haut collaborateur de M. Bush sous couvert d'anonymat.

M. Clinton avait causé beaucoup de bruit en graciant 140 personnes le dernier jour.

M. Bush, lui, a commué les peines de Jose Alonso Compean et d'Ignacio Ramos, des garde-frontières qui avaient été condamnés en novembre 2008 à respectivement 12 ans et 11 ans de prison pour avoir ouvert le feu le 17 février 2005 à la frontière entre le Texas (sud) et le Mexique sur un homme qui avait pris la fuite après avoir été intercepté.

L'homme avait été atteint d'une balle au postérieur mais avait réussi à repasser la frontière.

La peine de prison des deux garde-frontières expirera désormais le 20 mars.

L'accusation leur reprochait d'avoir tiré sur Osvaldo Aldrete Davila alors qu'il n'était pas armé et qu'ils ne savaient pas encore qu'il transportait plus de 300 kilos de marijuana dans son véhicule. Elle les accusait aussi d'avoir tenté d'étouffer l'affaire en ne rapportant pas les faits à leur hiérarchie.

Mais leur mise en cause a soulevé une controverse d'autant plus vive qu'elle a coïncidé avec le grand projet, finalement avorté, de M. Bush de réformer les lois sur l'immigration.

Les garde-frontières ont reçu de nombreux soutiens de personnalités de droite mais aussi de gauche selon lesquelles ils n'avaient fait que leur travail.

M. Bush était soumis à une forte pression de la part des élus de son Etat du Texas qui lui demandaient de faire acte d'indulgence.

Pour M. Bush, les deux hommes ont reçu «un procès équitable», a dit un responsable de l'administration. Mais il a jugé excessives la longueur et les conditions de la peine puisque, «pour leur propre sécurité», les garde-frontières étaient dans un isolement quasi total.

M. Bush a aussi pris en compte le fait que les deux hommes avaient bénéficé de sympathies dans les deux camps politiques, de la part d'un collaborateur aussi éminent de M. Obama que Rahm Emanuel par exemple, a-t-il dit.

Si M. Bush s'en tenait effectivement là, des centaines de requêtes resteraient en souffrance au département de la Justice.

Il aura fait un usage très modéré de cette prérogative présidentielle, prononçant 190 grâces (il est revenu sur l'une d'elles) et 11 commutations.

Jimmy Carter avait exercé à 566 reprises son droit de clémence, Ronald Reagan 406, et Bill Clinton 459.

M. Bush a mis un point d'honneur à assurer à M. Obama la transition «la plus en douceur possible». Les équipes Bush et Obama se sont entendues lundi pour que Robert Gates, qui restera à son poste de secrétaire à la Défense d'une administration à l'autre, reste à l'écart de la cérémonie d'investiture mardi pour assumer la présidence en cas de malheur.