Le président élu américain Barack Obama compte charger le prochain directeur de la CIA de mettre fin aux méthodes controversées de l'agence de renseignement en matière de lutte antiterroriste, tout en prenant le soin d'éviter une «chasse aux sorcières».

Selon des sources démocrates, Leon Panetta, 70 ans, ancien proche collaborateur de Bill Clinton sans réelle expérience dans le domaine du renseignement, va être désigné à la tête de la CIA, provoquant des remous à Washington.M. Obama, qui pourrait officiellement annoncer sa décision mercredi, a cherché mardi à justifier ses choix.

«Vous allez découvrir une équipe déterminée à mettre fin aux anciennes pratiques et aux problèmes qui ont terni l'image des services de renseignement et de la politique étrangère américaine», a fait valoir le futur locataire de la Maison-Blanche mardi.

Au nom de la guerre contre le terrorisme lancée après le 11-Septembre par le président George W. Bush, la CIA a reconnu avoir eu recours à la simulation de noyade pour interroger certains suspects, une pratique généralement considérée comme de la torture.

L'agence a également admis avoir envoyé des détenus subir des interrogatoires dans des pays réputés pratiquer la torture, ou encore les avoir enfermés dans des prisons secrètes.

Certains défenseurs des droits de l'homme appellent à la création d'une «commission de la vérité» pour juger ces politiques controversées.

Mais M. Obama a mis en garde mardi contre la tentation d'une «chasse aux sorcières», en soulignant que les services américains de renseignement comptaient des professionnels «remarquables», et que son administration s'efforcerait de «ne pas regarder derrière nous mais devant nous».

Les déclarations de M. Obama sonnaient comme une justification à la désignation de M. Panetta à la CIA, un choix critiqué par certains qui dénoncent son inexpérience en matière de renseignement et de lutte antiterroriste à l'heure où Washington est engagé dans deux guerres et continue de se battre contre Al-Qaeda.

«Ma position a toujours été que la CIA est mieux servie par un professionnel du renseignement», avait déclaré lundi la sénatrice démocrate Dianne Feinstein (Californie) qui doit présider la Commission des renseignements du Sénat. Elle s'est toutefois radoucie mardi après une conversation avec le futur président. «J'ai hâte de parler à M. Panetta des problèmes critiques auxquels le renseignement est confronté et de ses projets pour y remédier».

M. Obama a loué de son côté les qualités de l'ancien secrétaire général de Bill Clinton à la Maison-Blanche, qui enseigne aujourd'hui la politique publique à l'Université de Santa Clara (Californie).

Sous Bill Clinton, «il était profondément impliqué dans les affaires internationales, la gestion de crise, et devait évaluer quotidiennement les rapports du renseignement», a-t-il fait valoir.

«Le choix d'une personne extérieure donne la perception d'une rupture nette avec les controverses des dernières années», estime de son côté Paul Pillar, un ancien haut responsable de la CIA.

«Il s'agit d'inspirer confiance au public, d'être fidèle au thème du changement», poursuit-il.

La CIA a déjà été dirigée par des non-spécialistes, avec succès dans le cas de George Bush père sous la présidence de Gerald Ford, dans l'impopularité pour John Deutch sous Clinton.

Quoiqu'il en soit, la désignation d'un membre de la CIA aurait également suscité la polémique.

John Brennan, ancien responsable de la CIA membre de l'équipe de transition de Barack Obama, a fait un temps figure de favori avant d'être écarté, a priori en raison de son implication dans le programme contesté de détention et d'interrogation de l'Agence.