Les tribunaux militaires spéciaux chargés de juger les détenus du centre de détention de la base américaine de Guantanamo, à Cuba, «souillent» la Constitution des Etats-Unis, a estimé l'ancien procureur chargé de juger les détenus, dans une interview à la BBC.

«J'étais en mission et ma mission était de condamner le plus grand nombre de détenus possible et de les emprisonner aussi longtemps que possible. Je n'avais aucun doute. Je croyais absolument en ce que je faisais», a raconté l'ancien lieutenant-colonel Darrel Vandeveld dans cette interview diffusée mardi, sa première depuis sa démission en septembre dernier.

Le militaire avait été nommé en 2007 procureur des commissions militaires chargées de juger les détenus de Guantanamo inculpés. Il avait quitté son poste en dénonçant un manque d'éthique dans la procédure.

Arrivé à son nouveau poste, le gradé avait trouvé un bureau «en désordre» et les avocats de la défense se voyaient refuser les preuves qui auraient pu aider leurs clients, soutenant parfois les accusations de «mauvais traitements», a raconté Darrel Vandeveld, interrogé depuis les Etats-Unis.

Plongé dans le doute, ce catholique fervent s'est alors confié à un prêtre jésuite, qui lui a conseillé de démissionner.

«J'étais convaincu ... qu'il était impossible de garantir que (les détenus) bénéficieraient d'un procès équitable», a-t-il ajouté, jugeant que les commissions militaires étaient «une tache sur l'armée américaine».

«Je connais tellement de combattants et de combattantes qui ont été souillés par Guantanamo, c'est pourquoi je dis la vérité sur Guantanamo et comment un petit nombre de personnes souillent l'armée américaine et la Constitution», dit-il.

Interrogé sur la volonté du président élu Barack Obama de fermer le centre, il répond: «S'il faut pour cela transférer temporairement (les suspects) aux Etats-Unis en vue de leur procès, qu'il en soit ainsi... Aucune justice ne sera obtenue à Guantanamo».

Un porte-parole de la Défense américaine, interrogé par la BBC, a «contesté» ces allégations. «Nous continuons à estimer que les commissions militaires offrent des procès équitables aux combattants ennemis inculpés de crimes de guerre», a-t-il ajouté.

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